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corpuscules, et si enfin ce sont toujours les mêmes matières qui nous tombent d’en haut. Tout cela peut varier, et tout cela nous apprendra à connaître quelque peu la constitution des abîmes infinis sur lesquels nous sommes portés.

On peut ajouter que la terre y est directement intéressée. En effet, la masse de substance qu’elle reçoit par cette voie, quelque faible qu’elle soit, le long temps finit par la multiplier énormément, et il est impossible de n’en pas tenir compte. Nous avons vu qu’il arrive sur notre globe, tous les jours, quelque pierre plus ou moins pesante ; en outre les bolides y laissent tomber leurs substances ; les traînées des étoiles filantes amènent des poussières météoriques. Tout cela est journalier, tout cela dure depuis des milliers d’années, et durera sans qu’on puisse assigner au phénomène aucune limite. Peu de substance sans doute nous parvient ainsi jour par jour, mais ce peu se renouvelle incessamment. Il est impossible de se faire une idée de ce que la terre a reçu de cette façon depuis son origine, et de ce qu’elle est destinée à recevoir dans un avenir illimité ; mais un point reste certain : c’est qu’on ne doit pas la considérer comme un corps dont la croissance soit finie, qui n’ait rien à acquérir et qui demeure avec la somme de matières qu’il eut au commencement. Cette somme s’accroît perpétuellement par des augmentations insensibles et journalières, mais qui finissent à la longue : par avoir une valeur.

Ceci importe particulièrement à la géologie. Plus on aura de notions sur la quantité et la qualité des substances qui nous arrivent ainsi des espaces célestes, plus on pourra apprécier certaines conditions géologiques : c’est du moins un nouvel élément qu’il faut faire entrer en ligne de compte. Les pierres qui sont tombées depuis environ le commencement de notre siècle ont été analysées chimiquement, et les résultats ont été toujours à peu près les mêmes. Dix-huit corps simples s’y sont rencontrés, savoir, sept métaux ; fer, nickel, cobalt, manganèse, cuivre, étain, chrome ; six radicaux terreux et alcalins : silicium, calcium, potassium, sodium, magnésium et aluminium ; quatre combustibles non métalliques : hydrogène, soufre, phosphore et carbone ; enfin le corps comburant, oxygène. Ainsi, non-seulement on n’y rencontre pas quelque matière chimique différente de toutes celles qu’on a déjà trouvées dans les entrailles de la terre, mais même ces pierres météoriques ne renferment pas le tiers des substances dont se compose l’écorce de notre globe : ce qui prouve qu’elles viennent de régions du ciel plus pauvres en espèces, ou, si l’on veut, moins riches que notre petite planète. Néanmoins cette uniformité de composition peut changer ; ainsi tout porte à croire que Chladni a eu pleine raison de faire rentrer dans la classe des pierres météoriques les masses de fer natif que l’on a trouvées en divers points du globe, loin de tout volcan,