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de leurs ressources, il en est résulté chez ceux qui produisent une souffrance beaucoup plus inquiétante que le mécontentement de ceux qui consomment.

Pendant l’année 1849, les droits de toute nature perçus à propos des boissons ont donné une recette brute de 99 millions pour le trésor, plus 28 millions pour les octrois municipaux. Dans les îles britanniques, les subsides au profit de l’état se sont élevés à 346 millions[1]. Les taxes municipales, s’il en existe sur les boissons, sont insignifiantes. Pourquoi cette énorme différence entre les deux pays ? Nous sommes persuadé que les boissons absorbées en Angleterre ont une valeur intrinsèque inférieure à celles que l’on consomme chez nous ; mais, chez nos voisins, tous ceux qui boivent paient, et la taxe est proportionnée autant que possible à la valeur de la marchandise. Le droit sur les boissons nationales est exercé au moyen d’une taxe sur le houblon et sur l’orge déjà macérée, de sorte que quiconque fait usage de bière fournit sa part d’impôt, et paie même d’autant plus que la bière qu’il boit est plus forte. En même temps, les vins et liqueurs importés pour les tables somptueuses supportent un droit de douane en rapport avec leurs prix. De cette manière, l’impôt est fécond sans être oppressif, parce que tous les consommateurs étant atteints proportionnellement, le produit des taxes s’élève avec le niveau de la richesse publique.

En France, les taxes sur les boissons constituent bien moins un impôt sur les consommations qu’un impôt sur les ventes. Sous prétexte qu’il ne serait pas possible d’inventorier les quantités produites chez deux millions de vignerons, et que ceux-ci, trop souvent obérés, seraient dans l’impossibilité de paver l’impôt par anticipation sur des marchandises dont ils ne trouvent pas toujours le débit, on a imaginé une réglementation fiscale dont voici les résultats[2]

Trente millions d’hectolitres de vins sont consommés annuellement en France, indépendamment de ceux qui sont transformés en eaux-de-vie et en vinaigres. Cette quantité supporte environ 63 millions de taxes diverses au profit du trésor, et 22 millions perçus par les villes

  1. Produits de l’impôt anglais sur les boissons en 1849 :
    Excise Droit sur les houblons 205,936 liv. st.
    Droit sur l’orge fermentée (malt) 4,904,066
    Licence des marchands 1,167,890
    Droit sur les spiritueux (alcool, eau-de-vie, genièvre). 5,757,236
    Douane Droit d’entrée sur les vins et liqueurs étrangères 1,803,527
    13,838,655 liv. st.

    Cette somme représente 345,966,375 francs.

  2. Nous prenons pour base l’année 1847.