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pour subventionner l’entreprise de M. Collins, entreprise qui a, comme on sait, abrégé merveilleusement la durée du voyage et triomphé de la concurrence anglaise. Le général Cass et divers autres orateurs ont demandé la subvention et l’obtiendront probablement. De son côté, le sénat du Massachusetts a envoyé au congrès des résolutions pour l’abaissement du port des lettres et des imprimés à travers l’Océan : il propose d’abaisser le tarif de 25 cents à 3 cents, et n’a pas de peine à démontrer que l’augmentation des lettres et des imprimés à transporter compenserait cet abaissement excessif du prix de transport. Les relations de l’Europe et de l’Amérique seraient plus suivies, plus actives, et se multiplieraient à l’infini par l’effet de cette diminution. À la chambre des représentans, on s’est occupé d’une question qui n’a pas encore reçu de solution et qui n’en recevra peut-être pas de long-temps encore, de l’homestead bill, mis en avant et soutenu par le parti démocratique. Il s’agit tout simplement de donner à chaque famille qui voudra la cultiver pendant cinq ans 160 acres de terre pris dans les millions de terres publiques appartenant au gouvernement fédéral. Ces terres se trouvent toutes dans les territoires nouvellement achetés, annexés ou conquis, dans l’Orégon, le Nouveau-Mexique, la Californie, etc. Ce bill serait un utile instrument de civilisation et aurait pour effet d’étendre rapidement la population dans ces immenses contrées encore incultes et désertes. Cependant il soulève de grandes questions et entre autres celle-ci : c’est que cette concession gratuite ne profiterait en rien à l’Union, qu’elle lui serait même désavantageuse, et qu’elle ne profiterait qu’aux états et aux territoires dans lesquels ces terres seront concédées.

L’affaire importante du moment, c’est toujours l’expédition du Japon, Nous avons eu les lettres officielles du ministre de la marine M. Graham, du secrétaire d’état des affaires étrangères M. Daniel Webster, et la lettre de M. Fillmore à l’empereur du Japon : elles sont conçues en termes modérés et colorent de bons prétextes l’expédition qui se prépare ; mais quelle est la nature des instructions secrètes données au commodore Perry ? Le public prend cette affaire très à cœur et appuie l’expédition de tous ses vœux : il se pourrait que l’expédition allât plus loin qu’on ne pense. « Le commodore Perry ne peut ignorer, écrivait récemment un journal de New-York, qu’il doit vaincre et pénétrer dans l’empire japonais ; mais, s’il se bornait simplement à en faire le tour, qu’il sache qu’il ne doit plus venir montrer sa figure aux États-Unis ! » Depuis le temps où les Carthaginois mettaient en croix leurs généraux vaincus, on n’a pas tenu un pareil langage. Quelques Japonais jetés par la tempête à San-Francisco ont été immédiatement recueillis et traités avec la plus grande hospitalité ; ils s’embarqueront avec l’expédition et seront remis sains et saufs entre les mains du gouvernement impérial. On espère que cette tactique réussira, et que les Japonais, se laissant prendre à cette preuve d’un bon naturel ; voudront bien ouvrir leurs ports. Pendant que les Américains s’apprêtent à cette expédition régulière, les aventuriers de l’Union songent, dit-on, à recommencer leurs expéditions plus qu’irrégulières contre Cuba et même à révolutionner le nord du Mexique. Il en sera très probablement de cette nouvelle aventure comme des précédentes.

La question de la présidence en est toujours au même point : les whigs du sud sont intraitables, et déclarent que le compromis doit être regardé comme