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Il faudrait citer presque entière l’élégie à une dame qu’il avait quittée pour une autre, et à laquelle il revenait :

Je m’estimois le premier des humains
D’avoir remis ma franchise en mes mains,
Quand la frayeur de retomber aux vôtres
Me fit résoudre à me jeter en d’autres,
Et me ranger sous l’empire plus doux
D’une qui sçut me garder contre vous.

Quittant pour moy sa fierté naturelle,
La belle Iris ne me fut point cruelle ;
Elle approuva mes désirs et mes feux,
Elle reçut mon amour et mes voeux,
Et me fit voir toutes les apparences
Dont les amans forment leurs espérances.
J’avoue aussi qu’un si doux traitement
Fit naître en moy quelque ressentiment,
Non pas d’amour, car mon ame parjure
Ne put jamais vous faire cette injure,
Mais d’amitié si sensible qu’un jour
Je pensois bien la changer en amour.
Je m’efforçois de découvrir en elle
Les mêmes traits qui vous rendent si belle,
Cette douceur et ces divins appas
Dont vous donnez la vie et le trépas,
De vos beautés la grace incomparable,
De votre esprit la grandeur admirable,
Cet entretien si charmant et si doux ;
Mais tout cela ne se trouve qu’en vous.
Je voyois bien qu’elle étoit animée
D’une beauté capable d’être aimée ;
Je remarquois en elle cent attraits,
Mais nullement ces flammes et ces traits,
Ces traits mortels et ces divines flammes
Dont vos beaux yeux frappent toutes les ames.
Combien de fois, admirant vos beautés,
Ou votre grace, ou les vives clartés
De votre esprit, ai-je dit en moi-même
Ah ! que Philis est digne que l’on l’aime ! etc.

On ne peut méconnaître une sensibilité vraie, l’accent de la passion ou, si l’on veut, du plaisir dans ces stances adressées à une Aminte qui nous est inconnue :