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les inscriptions prises par les vendeurs d’immeubles pour le solde des prix de vente.

Dans l’exposé ministériel du 8 août 1850, on a évalué à 9 ou 10 pour 100 en moyenne le taux des emprunts sur hypothèques. M. Chegaray, après avoir analysé de nombreux documens, a abaissé cette moyenne à 7 pour 100. Il y a une distinction à faire, selon nous, entre les hypothèques provenant des emprunts et celles qui ont pour but d’assurer le paiement intégral des biens vendus. Il est peut-être permis d’évaluer l’intérêt des premiers à 9 pour 100, y compris les courtages et les frais à la charge des emprunteurs : quant aux autres obligations, qui sont les plus nombreuses, elles n’entraînent presque jamais un intérêt supérieur à 5 pour 100. À ce compte, la moyenne de l’intérêt à servir sur les 10 milliards de la dette hypothécaire serait de 620 millions[1], soit 6 1/5 pour 100.

Il était curieux d’établir par approximation le rapport qui existe entre les redevances qui surchargent la propriété territoriale, prise dans son ensemble, et la valeur qu’elle représente tant en capital qu’en revenu. Les administrateurs et les statisticiens qui ont entrepris ce calcul de probabilités ont commis, ce nous semble, une double erreur. Ils ont pris pour base les chiffres conventionnels du revenu cadastral, qui sont bien inférieurs aux chiffres des revenus effectifs ; puis ils ont capitalisé ces revenus, à raison de 3 ou 4 pour 100, en bloc, sans distinguer les fonds ruraux des propriétés bâties. Par exemple, sans sortir du rayon des études provoquées par cette grande affaire du crédit foncier, M. Thiers, estimant à 2,200 millions la rente des immeubles de toute nature, capitalise cette rente à raison de 3 pour 100, ce qui lui permet d’attribuer à la totalité des biens-fonds une valeur vénale de plus de 73 milliards. M. Chegaray au contraire, après avoir réduit le revenu foncier à 1,920 millions, capitalise à 4 pour 100 et ne trouve plus qu’une valeur totale de 48 milliards.

Nous nous sommes appliqué depuis long-temps, et par des recherches de toutes sortes, à diriger quelques jets de lumière sur ce point, qui domine toute notre économie sociale. En consacrant dans ce recueil même[2] une analyse spéciale à l’industrie agricole, nous avons constaté que le revenu net de la propriété rurale (et, par revenu net, nous entendons seulement la part afférente au capital immobilisé par le possesseur du fonds, indépendamment du produit qu’il peut réaliser comme entrepreneur de culture), nous avons constaté, disons-nous, que le revenu net de la terre cultivable s’élève à 2 milliards 50 millions,

  1. M. Chegaray, portant l’intérêt à 7 pour 100, mais réduisant le capital de la dette à 8 milliards, n’estime l’annuité à servir par la propriété qu’à 560 millions.
  2. Voir, dans la Revue des Deux Mondes, livraison du 15 septembre 1548, un article sur l’Industrie agricole en France.