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ou mixtes, et les chambres ne peuvent délibérer de ces sortes d’affaires. Ce conseil enfin édictait un chapitre spécialement consacré à son attribution de fonctions ; ce conseil se réunit toutes les fois qu’il y a lieu pour le souverain pontife de rejeter ou de sanctionner une loi ; il donne son avis secret sur cette loi, et c’est après avoir entendu cet avis que le pape oppose son veto ou accorde sa sanction. Il est inutile de montrer par de longs discours en quoi l’établissement d’un pareil pouvoir était incompatible avec l’exercice régulier d’un gouvernement constitutionnel. Le conseil des cardinaux, grace à ses privilèges de préséance, de veto et de connaissance exclusive des affaires ecclésiastiques ou mixtes (et qu’est-ce qui n’est pas ou ecclésiastique ou mixte dans le gouvernement romain ?), restait le véritable et unique dépositaire de la souveraineté tant laïque que religieuse et temporelle que spirituelle, et il était inévitable qu’une multitude de conflits, et des plus graves, sortissent un jour ou l’autre d’un tel mélange d’attributions.

Ces conflits n’éclatèrent pas sous l’administration du cardinal Antonelli, soit que, cette administration ayant été très courte, ils n’aient pas eu le temps de naître, soit que, les chambres n’étant pas encore réunies (elles n’étaient convoquées que pour le 5 juin), la malice des esprits n’ait pas eu occasion de les provoquer, soit enfin que le cardinal Antonelli, en sa qualité de prélat et de membre du sacré collège, ait eu pour le privilège politique conservé aux mains du grand corps dont il faisait partie un respect légitime après tout, puisqu’il était ordonné par le pacte fondamental, qui prévint toute contestation. Dans le fait, tant qu’il fut en fonctions, ce fut le collège des cardinaux, infiniment plus que le ministère, qui gouverna, et ce ne fut un mystère pour personne.

Ce n’était pas sur cette difficulté intérieure, dont les embarras du reste, à cause de la réunion prochaine des chambres, étaient bien plus dévolus à son successeur qu’à lui, que le cardinal Antonelli devait tomber : c’était sur la question, de jour en jour plus formidable, de savoir quel parti devait prendre le pape dans la croisade qui de toutes parts s’annonçait contre l’occupation étrangère.

La révolution de février avait porté au comble l’effervescence déjà si grande des esprits. Dès que la nouvelle en était parvenue à Turin, à Florence, à Rome, à Naples, le parti libéral avait fait entendre un cri d’indépendance dont toute la péninsule avait frémi. Le roi de Piémont, qui nourrissait contre l’Autriche une immortelle haine, et sur les provinces lombardo-vénitiennes des vues qu’il avait héritées de toute sa race, faisait des préparatifs de guerre dans la confidence desquels le public entier se trouvait. Tout annonçait une explosion. Les Milanais en donnèrent le signal. Bientôt toute la Haute-Italie fut en