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est au centre de la face placée en regard du Qasr. Nous y montâmes, et de là nous vîmes tout l’intérieur de cette forteresse plus ancienne coupé dans le sens du sud au nord par des files non interrompues de décombres formés de grosses pierres noires irrégulières, restes d’édifices écrasés sur place. Je ne doute pas que cette enceinte ne soit celle de la Masada bâtie par Jonathas au dire de Josèphe. Tout le reste donc est l’œuvre d’Hérode-le-Grand. Quelques murs sont bâtis en grosses pierres régulières reliées entre elles par de petites pierres tenant lieu des joints du ciment. Ce genre de construction se retrouve aux citernes de Jérusalem et d’El-Birèh. Vers l’est, c’est-à-dire du côté de la mer Morte, il n’y a plus de traces d’une muraille aussi belle et aussi solidement bâtie que celle qui dominait le plateau de Leukè. Cela se conçoit, il n’y avait pas d’attaque craindre de ce côté, où les oiseaux seuls peuvent atteindre directement. Un cordon de décombres borde cependant partout la crête du plateau de Masada. Du bord où nous étions alors, nous jugeâmes à merveille de l’état merveilleux de conservation des travaux de siège exécutés sous les ordres de Sylva, et il me fut très facile d’en prendre un plan cavalier. Quatre redoutes carrées commandent, l’une le ravin de gauche, et les trois autres l’Ouad-el-Hafaf (vallée des ruines). À partir de ces postes, qui sont reliés entre eux par un retranchement de rocaille, commencent deux retranchemens de même construction qui saisissent le rocher de Masada comme entre les deux branches d’une tenaille. Ces lignes de circonvallation sont immenses, et elles règnent sans interruption sur le flanc gauche de la montagne de Sebbeh aussi bien que sur le flanc de la haute montagne qui fait face à Masada de l’autre côté de l’Ouad-el-Hafaf. Cette ligne venait probablement se fermer au camp même de Sylva, ou, ainsi que je l’ai vérifié, vient aboutir la branche de gauche. Au reste, le plateau est libre d’édifices, si ce n’est vers la pointe nord, où sont le Qasr et une citerne, et vers la pointe sud, où sont une autre citerne et un amas de ruines appartenant peut-être à une caserne. Dans le flanc sud du rocher sont percés un puits et un caveau garnis sur toutes leurs parois d’un ciment très solide et très uni, On ne peut y descendre qu’en s’exposant à un véritable danger, parce que l’on est pour ainsi dire suspendu au-dessus de l’Ouad-el-Hafaf, qui s’ouvre à plus de quinze cents pieds plus bas : il faut atteindre l’entrée d’un petit escalier de quelques marches qui débouche dans le souterrain. Il serait difficile de n’y pas reconnaître l’un de ces magasins dans lesquels étaient accumulées les provisions qui pouvaient, à Masada, rester des années sans se détériorer.

Chemin faisant, nous rencontrâmes encore une citerne ou mieux un puits, et, revenant au côté ouest, c’est-à-dire au côté dans lequel est ouverte la porte d’entrée, et contre lequel sont disposées des tours