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Vers la montée du côté occidental, Hérode construisit aussi un palais placé en dedans des murailles et tourné vers le septentrion. Les murs de ce palais étaient d’une grande élévation et très solides ; ils étaient garnis aux angles de quatre tours de soixante coudées de hauteur. Là se trouvaient réunis des appartemens variés et somptueux, des portiques et des salles de bains soutenus partout par des colonnes monolithes. Le sol et les parois des apparternens étaient ornés de mosaïques. Dans chaque habitation, sur le plateau, autour du palais et devant la muraille, de grandes citernes avaient été creusées dans le rocher pour conserver l’eau, de manière à en fournir en aussi grande quantité que s’il y eût eu là des sources d’eau vive. Un chemin encaissé menait du palais au point le plus élevé de la forteresse sans qu’il fût possible de voir ce chemin du dehors. Du reste, les routes visibles elles-mêmes n’étaient pas faciles à suivre pour les ennemis. Le chemin de l’orient était par sa nature inaccessible, et une tour placée dans un passage très étroit fermait celui de l’occident. Cette tour était distante de la citadelle d’au moins mille coudées, impossible à franchir, difficile à forcer. Au-delà, ceux même qui s’avançaient sans crainte ne pouvaient pas marcher sans difficulté. Ainsi la nature, secondée par l’industrie des hommes, défendait la forteresse contre toute attaque.

Quant aux ressources intérieures, elles étaient plus abondantes encore. Il y avait du blé caché en quantité suffisante pour un temps très long ; il y avait aussi beaucoup de vin, d’huile, de graines légumineuses de toute espèce, et des dattes accumulées dans les magasins. Éléazar et ses brigands, lorsqu’ils s’emparèrent par ruse de la forteresse, y trouvèrent toutes les provisions en aussi bon état que si le tout y eût été récemment déposé, bien qu’il se fût écoulé près d’un siècle depuis l’époque où ces munitions avaient été emmagasinées pour résister à l’invasion romaine. Les Romains eux-mêmes, lorsqu’ils se lurent rendus maîtres de la place, y trouvèrent les restes de ces provisions, qui semblaient toutes fraîches. Il est vraisemblable qu’il faut attribuer à l’atmosphère du lieu cette étonnante conservation des vivres, et que la hauteur de la citadelle y garantit l’air contre toute influence délétère de la plaine. La citadelle renfermait en outre des armes en quantité suffisante pour équiper dix mille hommes, du fer brut, de l’acier et du plomb. Il était facile de juger que de pareilles précautions n’avaient point été prises sans motifs très sérieux. Aussi dit-on qu’Hérode s’était fait construire ce château comme une place de refuge contre le double danger qu’il redoutait. D’abord il craignait que le peuple juif ne le fît descendre du trône pour y replacer les descendans des rois ses prédécesseurs ; d’un autre côté, il se préoccupait bien plus fortement encore des intrigues de la reine d’Égypte Cléopâtre. Celle-ci, en effet, ne prenait pas la peine de cacher ses desseins,