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traité par le paysan. S’il était un type dont on avait jusqu’ici respecté la simplicité démocratique et vertueuse, c’était bien le soldat laboureur, le vieil officier rentré dans ses foyers. Le paysan de mon journal n’est plus si niais. Jacques va trouver le capitaine, un capitaine qui a vu l’autre, qui a été sergent s’il vous plaît, qui est enfant du peuple, rien n’y manque, si ce n’est qu’il ne sait pas assez bien lire et écrire pour présider un club, — et Jacques se moque du capitaine, couvert de balafres et de croix. « La discipline, la discipline, avec cela on vient à bout de tout, » dit le vieux militaire. — Et Jacques de répondre « Sous ce régime, monsieur le capitaine, ceux qui commanderaient seraient heureux, ceux qui obéiraient fort malheureux ; or, comme le peuple obéirait toujours, le peuple serait toujours malheureux. N’en parlons plus ; votre politique ne sera jamais la politique du paysan. » Supposez-vous que les gens qu’on aura nourris de cette saine lecture iront ensuite voter en braves pour leur empereur ? Ils seraient plutôt tout préparés à voter selon le mot d’ordre qui leur viendrait de quelque comité de résistance, ou bien peut-être au besoin à faire ainsi qu’il est écrit dans le onzième bulletin, lequel vient de paraître, — c’est l’évangile de ce jour, — à s’emparer d’abord du droit au fusil, sauf à s’amuser ensuite du droit de suffrage.

Ces lamentables dispositions se montrent trop visiblement et de trop de côtés ; ce sera l’un des torts les plus graves de la montagne parlementaire vis-à-vis de l’histoire de les avoir encouragées à plaisir et comme avec un parti pris de chercher en dehors de l’assemblée la revanche qui lui échappe toujours à l’intérieur. Ce droit au fusil, elle l’a réclamé en propres termes dans la discussion de la loi organique sur la garde nationale. M. Napoléon Bonaparte, qui est très républicain, comme chacun sait, en sa qualité d’en-cas pour une présidence rouge, M. Napoléon Bonaparte a prêté là le secours de son éloquence ; tout ce que nous pouvons dire du rôle que la montagne voudrait attribuer à la garde nationale, c’est qu’il faut réellement les hyperboles en sens inverse du général de Grammont pour nous réconcilier avec cette honorable et civique institution, qui a passé de nos anciennes mœurs dans nos mœurs nouvelles. Il n’y a qu’à se résigner en l’acceptant telle qu’elle est dans son essence, parce que pour la supprimer on n’oserait, et pour la changer on ne peut. Nous ne nous soucions pas beaucoup, qu’elle fasse profession d’éclairer l’armée, comme l’entend M. Hennequin ; nous ne serions pas beaucoup plus fiers que l’armée fit profession de la compter pour rien, comme M. de Grammont a l’air de s’en vanter après quoi nous avouons qu’il nous serait difficile de ne point excuser les singularités qui émaillent la politique et la faconde de l’honorable général en considération des méchans quarts d’heure qu’il a dû faire passer « aux voraces, aux ventre-creux et aux rutilans, lorsqu’il avait l’honneur de commander à la Guillotière, le plus mauvais des faubourgs de Lyon. » M. Baune a réclamé la parole pour une question personnelle et vengé ses commettans par des injures à l’adresse de leur brave ennemi. La montagne ne néglige jamais de couvrir, tant qu’elle peut ses postes fortifiés, de donner à tous les siens des marques de sa protection et de sa vigilance. On a vu le tumulte soulevé par la simple déposition du projet de loi qui doit concentrer la police de Lyon et des communes suburbaines entre les mains du préfet du Rhône, avec attribution spéciale des