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a-t-on beaucoup dit, pour se produire que la première élection générale dont la France sera le théâtre. Nous ne sommes pas outre mesure effrayés de ces menaces ; une indignation si bien réglée, si prudemment ajournée, ne nous paraît pas menacer de tout emporter devant elle. La loi du 31 mai sera exécutée, nous n’en doutons pas, à une condition cependant, c’est qu’il y ait un pouvoir exécutif debout. Donnez nous un pouvoir énergique, et la loi du 31 mai sera exécutée comme elle a été faite, sans autre résistance que d’impuissantes fanfaronnades ; mais pour agir il faut être, et le cours légal de la constitution abîme le pouvoir dans le néant en 1852. C’est là le véritable danger des élections prochaines. Espérerait-on le fuir en lui cédant le terrain ? En dénaturant la loi du 31 mai pour complaire aux violences de l’opposition, espérerait-on la ramener à déposer un vote paisible dans l’urne électorale ? Ce serait l’illusion de la faiblesse. À moins de revenir au suffrage universel tel que l’avait organisé le gouvernement provisoire, c’est-à-dire au chaos électoral ; à moins de laisser de nouveau à une majorité factice la faculté d’opprimer, à l’aide des populations vagabondes, le vœu sincère du pays, le parti révolutionnaire ne se contentera d’aucune loi électorale. Toute organisation électorale régulière rencontrera de sa part la même opposition que la loi du 31 mai ; il lui faut la confusion ou le conflit. Des élections perdues dans le désordre ou opprimées par la violence sont la seule chose qui lui convienne, et pour nous, il faudra, à la prochaine lutte électorale, nous résigner à livrer le sort de la France au droit par la force.

Le parti de l’ordre, je le sais, n’est point à sa première épreuve pour une telle lutte. Il lui est arrivé de la soutenir non-seulement sans gouvernement pour l’appuyer, mais même en face d’un gouvernement qui le combattait. Nous n’avons point oublié l’attitude courageuse des départemens en présence des commissaires et à la lecture des circulaires -du gouvernement provisoire. Nous nous rappelons comment s’évanouirent en fumée les menaces des fondateurs de la république. Aussi il est une condition qui, dans toutes les crises, pourrait suppléer à nos yeux comme gage de sincérité à l’existence et l’action d’un gouvernement régulier. Cette condition c’est l’union franche, loyale, complète de tous les défenseurs de l’ordre ; c’est cette union telle qu’elle est sortie émue et pour ainsi dire brûlante du terrible combat de juin 1848. Nous croyons fermement que le parti de l’ordre bien uni et tout armé comme nous l’avons se défendre et tenir à lui seul lieu de gouvernement au pays. Nous espérons aussi que union, fort ébranlée dans ces derniers temps, n’est pas définitivement rompue ; nous essaierons même de dire tout à l’heure sur