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REVUE DES DEUX MONDES.
BOUCHARD.

Il ne s’est pas soucié de rester avec nous. J’ai pris les lettres, il m’a dit deux paroles, et je ne l’ai plus revu.

LE PRINCE DE CONDÉ.

Mais les lettres ?

BOUCHARD.

Les voici, monseigneur.

LE PRINCE DE CONDÉ.

Donnez vite. (Il jette les yeux sur la première lettre.) Ah ! c’est de la duchesse. Il en a tant reçu de ces lettres-là, qu’une de plus… Vous pouvez la remettre, (Il prend la seconde lettre.) Quant à celle-ci, voyons : À mes cousins MM. de Bourbon. C’est la main de la reine-mère. Je l’ouvre, celle-ci. (Pendant qu’il lit des yeux.) Toujours la même antienne : la parole du roi, la sienne ; ces mêmes phrases que le cardinal et d’Armagnac nous récitaient tout à l’heure… rien de plus.

BOUCHARD, à part.

Voyons si le post-scriptum produira plus d’effet L’y voici. Malepeste ! comme il change de figure ! Je ne me trompais pas. (Il tire de sa poche le cachet aux armes d’Écosse.) Puisqu’il en est ainsi, nous vous tenons, beau prince !

LE PRINCE DE CONDÉ, à part, relisant le post-scriptum.

« La reine, notre chère fille, ne veut l’ouvrir qu’en compagnie de MM. ses cousins… » Enfin ! elle se souvient que je suis au monde ! Mais ce n’est pas elle qui me le dit ! Elle aurait pu choisir un autre secrétaire. Tout ce qui vient de cette Florentine me semble louche et me met sur mes gardes. (Haut.) Bouchard, ne vous a-t-on remis que ces deux lettres ?

BOUCHARD.

Pas d’autres, monseigneur.

LE PRINCE DE CONDÉ.

Mais, que vous a-t-on dit ?

BOUCHARD.

Seulement ces mots : deux lettres pour le roi et ceci pour M. le prince, pour lui seul.

LE PRINCE DE CONDÉ.

Pour moi ! mais vous ne m’avez rien donné.

BOUCHARD.

Ah ! pardon, monseigneur, (il porte la main à son pourpoint.) Je ne sais pas trop ce que c’est : un bijou, un cachet, je crois.

LE PRINCE DE CONDÉ.

Voyons. (À part.) Bénédiction ! son cachet, son propre cachet ! (Haut.) Et c’est à moi, vous en êtes sûr, que ceci est destiné ?