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portefeuilles. Nous ne voudrions pas avancer que de la possession seule de l’inscription de Bisitoun dépend le succès des efforts tentés pour arriver à la connaissance de l’écriture assyrienne, mais nous affirmons sans crainte que, le jour où cette inscription ne sera plus confisquée au profit d’un seul, la question aura fait un pas immense.

Voyons quels sont les résultats obtenus jusqu’ici. Depuis long-temps, le rôle de l’indice des noms assyriens avait été reconnu dans les textes trilingues. L’analyse de ces noms mêmes avait été à plusieurs reprises opérée à petit bruit et dans le silence du cabinet. M. Isidore de Lœwenstern est le premier qui, sur cet intéressant sujet, ait livré au public un travail important. Reprenant la question ab ovo, il a opéré l’analyse de ces noms propres, et a publié les résultats de cette analyse. Ses recherches l’ont conduit de plus à reconnaître, dans l’écriture assyrienne, l’emploi de signes homophones dans toute l’acception du mot, c’est-à-dire de signes très divers de forme, représentant, comme cela a lieu dans les écritures égyptiennes, des articulations alphabétiques identiques. En résumé, le livre de M. de Lœwenstern, s’il n’est pas inattaquable dans toutes ses parties, a du moins le premier mis le public lettré en possession d’un certain nombre de valeurs alphabétiques qui nous paraissent parfaitement certaines. De son côté, M. Botta a commencé la publication d’un travail dont il n’est pas possible de méconnaître l’importance. Il a, avec une patience merveilleuse, disséqué lettre par lettre les innombrables textes assyriens que le palais de Khorsabad lui avait fournis. Il a fait le même travail sur les inscriptions de Van et sur les inscriptions trilingues, et il est parvenu de la sorte à construire un catalogue extrêmement curieux, dans lequel toutes les permutations des signes assyriens sont enregistrées. Quand ce travail sera achevé, nous posséderons très probablement de bien précieux élémens à mettre en œuvre dans la recherche du problème. Tous les signes qui permutent entre eux dans les textes assyriens y seront classés, et il restera alors à reconnaître si, parmi les permutations constatées, toutes sont des indices évidens d’homophonie, ou si quelques-unes d’entre elles ne cachent pas en réalité de simples désinences grammaticales à déterminer.

Jusqu’ici, la langue elle-même nous échappe, et il reste impossible d’en fixer à priori la nature. Toutefois la position géographique de la contrée dans laquelle cette langue était parlée permet de pressentir qu’elle offrira certains rapports plus ou moins étroits avec les idiomes des contrées limitrophes. L’origine sémitique de la race assyrienne, origine suffisamment constatée par l’Écriture, ne permet pas de douter qu’on y trouvera de nombreux radicaux sémitiques, très probablement comparables à ceux qui constituent la langue chaldéenne. D’un autre côté, il n’est guère possible de méconnaître dès à présent