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LE SALON.

mentionnés, s’ils n’avaient le mérite de rappeler ceux de M. Barye, et de faire sentir la convenance d’un jugement qui exclut les uns et admet les autres.

Lorsqu’on a parcouru pas à pas cette immense collection des œuvres de l’art contemporain, et qu’on a fermé le livret à sa dernière page, on est tenté de poser des questions. Où va l’art ? Est-il en progrès ou en décadence ? Peut-on, d’après ce qui se fait, prévoir ce qui se fera ? Mais on n’est guère tenté de chercher une réponse. L’œil le plus pénétrant ne saurait regarder bien loin dans la fortune future de l’art. Les révolutions du goût sont, comme celles de la société, toujours imprévues quant au temps, toujours différentes de ce qu’avait pu préjuger la raison qui construit l’avenir sur le modèle du passé. Qui aurait prévu qu’après Poussin viendraient Vanloo et Boucher, après ceux-ci, et presque sans transition, David, et après David, ce que nous voyons ? Et non-seulement la destinée, même prochaine, de l’art dépasse la portée de nos prévisions, mais son état présent nous échappe. Plongés au sein des choses, nous n’en voyons que les détails, les diversités ; nous en sommes trop près pour embrasser l’ensemble, qui ne peut être saisi que dans la perspective du temps. Il doit y avoir une unité, une physionomie générale dans les produits de l’art contemporain. Qui pourrait aujourd’hui reconnaître, nommer cette résultante ? Nous n’essaierons donc même pas d’agiter ces problèmes ; nous n’ajouterons pas à tant de décisions si sujettes à erreur sur le présent des hypothèses sur l’avenir, et nous terminerons ici nos observations sur le salon de 1843.


L. Peisse.