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sition savante des lignes, et par la solution heureuse d’une foule de difficultés pratiques. Les hommes du métier admirent surtout cette longue file de toques rouges et violettes, dont la réunion, nécessitée par la perspective, pouvait être de l’effet le plus ingrat, et dont l’artiste a tiré un effet piquant. Nous admettons et même nous sentons toutes ces qualités, nous reconnaissons tout ce qu’il y a d’habileté, de savoir et de talent dans ces tableaux de M. Alaux ; mais il n’est pas moins certain que ces peintures sont de celles dont on voit immédiatement le fonds ; elles vous donnent ce qu’elles ont, tout à la fois. Aussi, à peine vues, on passe outre, et on n’y revient plus. Ceci n’est pas une critique, c’est une simple observation.

Plaçons immédiatement ici, comme à leur place naturelle, les tableaux de M. Granet, dont le vigoureux talent n’a pas plus besoin d’explications que d’éloges. Quoique un peu blasés sur des effets qu’on voit depuis plus de trente ans, on ne peut s’empêcher de dire que dans cette lumière, en apparence si facile à imiter, cet artiste conserve encore un cachet de maître. Avec M. Granet, rappelons un nom qui, à une autre époque, brilla à côté du sien, celui de M. Revoil, fondateur et chef de cette école de Lyon, si florissante dans les premières années de la restauration, mais dont il reste peu de traces. Nous avons vu avec intérêt reparaître sur le livret le nom de cet artiste. Parmi les ouvrages qu’il expose cette année, son Philippe-Auguste est le plus important par la composition ; mais nous préférons son Giotto.

C’est faute d’une meilleure place que nous intercalerons ici d’abord la bataille du Col de Teniah, par M. Bellangé, exacte comme un bulletin, et peinte avec la verve et le talent tout spécial de l’artiste ; ensuite, un épisode de la retraite de Moscou, le Combat de Krasnoë, représenté par M. Langlois avec un grand effet de couleur locale ; et enfin, le Combat du Sig par M. Baume. Et puisque nous sommes ici hors de toute classification régulière, nous saisissons cette occasion de rappeler quelques peintures oubliées dans la rapidité de notre course, et qui, à divers titres, méritent au moins une mention. D’abord, l’Arnold-de-Mechtal, de M. Lugardon, qui, en bon patriote, ne sort pas de l’histoire suisse : il a un peu changé sa manière ; de noir il est devenu rouge. Nous ne savons trop s’il y a gagné ou perdu. Les premiers ouvrages de cet artiste avaient promis plus qu’il n’a donné depuis. L’Homère de M. Leloir paraît avoir donné des scrupules à quelques personnes, mais on peut se tranquilliser parfaitement l’esprit sur cette peinture, en disant qu’elle n’a d’autre mérite