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DE LA PUISSANCE ANGLAISE DANS L’INDE ET EN CHINE.

Ces documens montrent distinctement les vues et les principes adoptés par le gouvernement au sujet du monopole.

En 1817, la cour des directeurs, faisant allusion aux vains efforts du gouvernement de l’Inde pour empêcher la culture du pavot dans certains districts, et à la nécessité de s’assurer à l’avenir d’un approvisionnement permanent pour la consommation intérieure, s’exprimait ainsi : « Notre seul but (et certainement c’en est un honorable) est de substituer une culture autorisée à une culture illégale, de restreindre un mal qui ne peut pas être entièrement réprimé, de régulariser une habitude entraînante de laquelle on ne peut sevrer le peuple, et d’employer le monopole moins comme un instrument de gain, que comme préservatif pour la santé et les principes de la communauté. Nous devons faire observer que notre désir est non-seulement de ne pas encourager la consommation de l’opium, mais encore d’en diminuer l’usage ou plutôt l’abus, et dans ce dessein, comme en vue de l’augmentation de nos revenus (prenant en considération les effets d’un commerce illicite dans nos propres possessions, et la concurrence que peut nous faire à l’étranger l’opium produit dans d’autres pays), nous pensons qu’il est convenable que le prix, tant au dehors qu’à l’intérieur, soit aussi élevé que possible. S’il dépendait de nous d’empêcher l’usage de l’opium, nous le ferions de grand cœur par compassion pour l’espèce humaine mais cela étant absolument impraticable, nous ne pouvons qu’employer tous nos efforts pour régulariser et pallier un mal qui ne peut pas être déraciné. »

La commission parlementaire à laquelle l’examen de cette importante question était renvoyé quinze ans après (en 1832), arrivait aux conclusions suivantes : « Dans l’état actuel des finances de l’Inde, il n’est pas prudent de renoncer à une source aussi importante de revenus, un droit sur l’opium étant un impôt qui tombe principalement sur l’étranger, et qui paraît au total moins sujet à objection que tout autre qu’on pourrait lui substituer. » — « Il ne faut pas perdre de vue, dit ailleurs le rapport, qu’une saine politique exige que cette dépendance éloignée de l’empire soit soumise à un système d’impôts aussi modéré que les besoins de son gouvernement peuvent l’admettre. » Ces mêmes considérations ont été reproduites avec force pendant la dernière session du parlement, dans le cours de la discussion relative aux affaires de Chine.

La compagnie a donc pu croire qu’en se rendant maîtresse de la production, elle agissait d’après des principes de saine administration,