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serait pas éloigné, si nous partagions les espérances de M. Thiers ; ce serait peu de jours après son entrée aux affaires, où il se trouverait bien isolé.

Déjà M. Odilon Barrot disait, il y a peu de jours ; « Le ministère me vient. Je ne l’ai pas souhaité, il vient trop tôt peut-être ; mais, quoi qu’il en soit, je saisirai la première occasion de m’emparer des limites du Rhin. » Or, s’emparer des limites du Rhin, c’est la guerre, la guerre que ne veut pas M. Thiers, mais que M. Odilon Barrot se croit très fondé à faire d’après les principes de M. Thiers, car s’il est permis de déchirer les traités, il vaut mieux déchirer ceux de 1815 qui nous empêchent de nous étendre jusqu’au Rhin, que celui des 24 articles qui donne aux Belges un morceau du Limbourg. Les risques sont les mêmes ; et, si nous faisons la guerre, faisons-la au moins pour nous. M. Thiers a beau vouloir, comme il le dit à ses électeurs, une politique prudente mais nationale, modérée mais libérale ; s’il entre aux affaires sur les ruines du système du 13 mars qu’il combat, et avec l’appui des députés du compte-rendu, ses alliés d’aujourd’hui, il subira les conséquences de leurs principes, qu’ils trouvent, eux aussi, prudens, nationaux, modérés et libéraux !

M. Thiers demande, en finissant, s’il sera ministre. M. Thiers sera député, et pour le bien de la France, pour son propre bien, pour la paix de l’Europe, il faut espérer qu’il ne sera rien de plus à présent. Nous le disons à regret, nous qui admirons son talent et qui aimons sa personne ; mais nous le disons hautement, et pour nous servir de ses propres paroles, nous aimons mieux lui déplaire que le trahir par une complaisance qui le perdrait.



LETTRE
SUR LES AFFAIRES EXTÉRIEURES.
XI.


Monsieur,

Les affaires de Belgique ont enfin reçu de la conférence de Londres la solution que je vous ai tant de fois annoncée comme la seule raisonnable et possible. Le traité des 24 articles, conclu et ratifié en 1831 entre les cinq puissances représentées à Londres et le roi des Belges, après avoir