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LA
PUCELLE DE CHAPELAIN
ET
LA PUCELLE DE VOLTAIRE.

I.
CHAPELAIN.

Il y a, par extraordinaire, dans notre histoire, dans l’histoire du peuple le plus sceptique, dit-on, et le plus moqueur de l’Europe, un sujet qui se prête admirablement au merveilleux. En 1429, une jeune fille de Lorraine, simple servante d’auberge, émue par les malheurs de la patrie, et ressentant dans son humble condition l’injure que la domination des Anglais faisait à la France, traverse le royaume et vient à Chinon trouver le roi Charles VII, lui annonçant qu’elle est chargée par Dieu de délivrer la ville d’Orléans, et de conduire le roi à travers les armées anglaises jusqu’à Reims, où il sera sacré. Le merveilleux de ce sujet n’a rien qui ressemble au merveilleux ordinaire. Il est gracieux et touchant, car l’héroïne est une jeune fille douce et timide avant son inspiration, hardie et fière pendant sa mission, noble et résignée dans sa captivité et dans son martyre. Non-seulement le sujet est merveilleux, mais il est national, car il s’agit de la délivrance du pays ; non-seulement il est national, mais il est populaire, car c’est une simple fille du peuple, et non une fière châtelaine, qui prend en main la cause de la France. Que