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de Rollin ; ils étaient réunis dans les galeries, au nombre de douze cents, lorsque le roi, touché de toutes les manifestations dont il était l’objet, leur adressa la parole pour les remercier. Dans cette improvisation qui se ressentait de l’émotion qu’il éprouvait, le roi, tout en se montrant pénétré de l’affection des jeunes élèves, ne put s’empêcher de porter ses regards au-delà de l’enceinte où il se trouvait, et de s’écrier : « L’histoire me jugera ; ce que j’ai fait depuis huit ans sera sans doute retracé dans ces galeries, et j’ai la confiance que le sentiment national me vengera de toutes les calomnies dont je suis abreuvé pendant ma vie, et dont vos acclamations sont déjà pour moi une consolation bien douce. » L’opposition a vu, dans ces simples paroles, un texte à accuser le ministère qui a la responsabilité de tous les actes de la couronne. Si le roi a été en butte à des calomnies, dit-elle, c’est que les ministres l’ont découvert ou fait sortir de cette position inaccessible que la Charte assigne à la royauté. On est amené à rechercher, ajoute l’opposition, par quelle série de fautes et de violences ministérielles la royauté de 1830 en est venue à se dire abreuvée d’amertume et de dégoûts. D’autres ajoutent que si le roi se plaint d’être calomnié, c’est sans doute parce que l’opposition soutient que le gouvernement constitutionnel est violé ; et ils demandent si le pays, qui veut être gouverné par les hommes les plus capables, par ceux qui ont la confiance de la majorité, est exaucé dans ses vœux. Le roi avait encore dit : « Il y a huit ans, à pareil jour, je répondais par mon acceptation solennelle au vœu national qui m’appelait au trône, et je jurais, dans le sein des chambres, de maintenir et de défendre ses lois et libertés si glorieusement reconquises, mais qui ne pouvaient se consolider que sous l’égide tutélaire du trône constitutionnel. » Ces mots si simples ont pourtant fait naître de violentes contradictions.

Pour ce qui est de gouverner sans le concours de la majorité, nous avons fait si souvent justice de cette assertion dans le cours de la session dernière, que nous nous croyons dispensés de revenir là-dessus. Il en est ainsi du gouvernement des capacités. Si les capacités, c’est-à-dire les hommes qui se disent propres au gouvernement à l’exclusion de tous les autres, ne sont pas à la tête des affaires, c’est apparemment que la majorité ne le veut pas ; car, pour nous, il est bien évident, et nous croyons l’avoir démontré de reste par tous les faits de la session, que la majorité s’y est montrée acquise au ministère. Nous resterions donc néanmoins dans les conditions du gouvernement représentatif, qui prescrit de se conformer au vœu de la majorité, mais non de mettre à la tête du gouvernement tel ou tel homme d’état réputé le plus capable. Nous sommes loin de nier le mérite et les droits des capacités dans quelque parti qu’elles se trouvent ; mais nous ne croyons pas que le gouvernement représentatif consiste à s’adresser à tour de rôle à un petit nombre d’hommes qui ont acquis une juste célébrité, il est vrai, mais qui n’ont pas conquis par là, que nous sachions, le droit d’être ministres à perpétuité. Sur ce point, la réponse à l’opposition est dès long-temps faite, et sous toutes les formes. Quant aux hérésies constitutionnelles trouvées dans les paroles