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documens officiels ne disent pas le contraire, et le reste classé sous le titre de sous-officiers et de soldats, sans qu’on puisse conjecturer qu’il y ait eu un seul mulâtre jugé digne de recevoir les galons de sergent ; enfin, pour appoint, en quelque sorte, 800 miliciens sédentaires, dont la composition plus ou moins illibérale ne nous est pas indiquée avec plus de clarté ni de franchise.

Sur un autre point, dont l’importance est grande, nous voulons parler de l’instruction publique, la sécheresse des explications administratives est encore plus désolante. Deux personnes seulement composaient, en 1836, à la Guadeloupe, le personnel salarié de l’instruction publique : un directeur et un moniteur général des écoles d’enseignement mutuel. Voilà tout ce qu’on trouve à nous dire sur cette grave question à laquelle se rattache tout l’espoir de la régénération coloniale.

Il nous tarde d’arriver à la notice de l’île Bourbon, qui, tout en laissant beaucoup à désirer encore, offre des résultats plus satisfaisans, et par cela même se montre plus disposée à entrer dans les détails.

L’ensemble de la population de l’île Bourbon, qui avait pu être constaté au 1er janvier 1837, s’élevait à 109,330 individus, dont 39,817 libres, et 69,513 esclaves. À ces chiffres, il faut ajouter, par approximation, 2 à 3,000 prolétaires libres, qui, ne possédant aucun esclave, ne fournissant aucun recensement à ce titre, et ne pouvant être recensés eux-mêmes, tant à cause de leur vie vagabonde ou profondément retirée, qu’en raison de l’insuffisance des réglemens, n’ont pas été compris dans le relevé général de la population.

Parmi les libres dont nous venons de donner le chiffre total (près de 40,000), sans distinction d’origine, on ne faisait entrer que pour le quart environ, au 31 décembre 1836, le nombre des personnes appartenant à l’ancienne classe de couleur libre, et en y comprenant les individus affranchis depuis 1830. Quant à ceux-ci, ils sont, la plupart, de vrais affranchis, bien désignés par ce nom, à la différence de la majorité de ceux qui ont été reconnus libres dans d’autres colonies, à partir de la même époque. À Bourbon, de la fin de 1830 au 30 novembre 1833, il y a eu 230 émancipés, on ne nous dit point à quel titre. Mais, du 1er décembre 1833 au 31 octobre 1837, il n’y en a eu que 125 qui aient été confirmés dans la liberté, comme patronés, et 2,622 esclaves ont passé d’une servitude complète à une liberté tout-à-fait nouvelle pour eux. C’est, comme on voit, un total de 2,977 individus admis, depuis 1830, dans les rangs de la population libre, et pour la majeure partie d’entre eux, c’est une situation