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LES UNIVERSITÉS SUÉDOISES.

lendemain, les professeurs se réunissent dans sa demeure, et toutes les facultés se rendent avec lui en procession à l’église, au son de la musique et des cloches, et précédées des sergens de l’université, des pedels portant le sceptre d’argent du recteur, comme autrefois les licteurs portaient les faisceaux des consuls. Là, il prononce un discours latin, il reçoit le serment de son successeur, et lui remet l’un après l’autre les insignes de sa dignité, le sceptre, le sceau, la clé des archives, la clé de la prison, le livre des statuts. Le secrétaire de l’académie lit un chapitre de la constitution. Le nouveau recteur adresse aux professeurs une courte harangue pour se recommander à eux ; puis on prie et l’on chante, et le corps universitaire s’en retourne en procession.

Il y a dans toutes ces réunions une telle candeur, une telle bonne foi, qu’on ne saurait y assister sans émotion. Par sa vie régulière et paisible, par son isolement, l’université de Lund est en position de garder long-temps ses anciennes mœurs, si quelque novateur imprudent ne vient pas jeter le trouble dans son cycle traditionnel.

La ville est bâtie à une lieue de la mer, dans une des plaines les plus riantes et les plus fécondes de la Suède. Elle est parsemée de fleurs et de jardins, entourée d’arbres à fruit et de champs de blé. Chaque professeur a là sa petite maison, fermée par une barrière, au milieu d’un enclos. Les arbres verts lui servent de rideau. Le matin l’alouette l’éveille en passant sous ses fenêtres, le soir le rossignol chante près de lui ; et quand on entre dans cette communauté universitaire, assise ainsi au milieu des arbres et des fleurs, on dirait une ruche d’abeilles. On y entend le bourdonnement de la science, et l’on y respire une sorte de parfum poétique.

Ces professeurs ont leurs vacances au mois de juin, et leurs vacances durent tout l’été. Les uns alors entreprennent un voyage scientifique, et ceux qui sont prêtres, se retirent ordinairement dans leur paroisse. J’ai visité un jour, avec celui qui en était titulaire et avec un de ses collègues, une de ces cures appartenant à l’université. J’entrai dans une maison champêtre bâtie au haut d’une colline. D’un côté était l’école fréquentée par une trentaine d’enfans qui se levèrent à notre approche et reprirent ensuite leurs leçons ; de l’autre, deux chambres modestes où le pasteur avait son lit, sa bibliothèque, et d’où l’on découvrait à la fois la mer, les champs, les murs de Copenhague, et une cinquantaine de villages dispersés dans la campagne. À quelques pas de là était l’église, protégée par une enceinte d’arbres, au milieu du cimetière. La demeure des morts avait reverdi au soleil de mai comme celle des vivans, et l’inscription sépulcrale était cachée sous des touffes de gazon. Au fond du cimetière, j’aperçus une tombe fraîche et riante couverte de couronnes. C’était celle du vicaire de la paroisse. Il avait été enterré peu de jours auparavant, et les jeunes filles du village étaient venues semer des fleurs sur son tombeau.

Nous entrâmes ensuite dans la maison d’un paysan. Les femmes étaient réunies dans une chambre, et filaient de la laine, comme en Islande. Quand