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LETTRES
SUR L’ISLANDE.

v.
LANGUE ET LITTÉRATURE.

À MONSIEUR VILLEMAIN,
SECRÉTAIRE PERPÉTUEL DE L’ACADÉMIE FRANÇAISE.

Les écrivains du nord, qui ont cherché à remonter aussi haut que possible dans les traditions primitives de leur pays, divisent en deux grandes familles la race gotho-caucasienne dont ils font provenir tant de peuples. La première se répand dans la Perse, la Chaldée, l’Inde, l’Égypte, et s’avance jusqu’au Thibet. Elle adore le soleil, elle se baigne dans le Gange, elle bâtit les pyramides. C’est la fille aînée de Sem, celle à qui sont échus en partage les rives fécondes du Nil et les jardins poétiques de Sacountala. Nous recourons à elle comme à notre sœur aînée. Son sphynx a des oracles que nous voudrions connaître. Ses védas renferment des trésors de sagesse que nous ne nous lassons pas de fouiller, et quand, à travers les siècles, son langage mystérieux nous arrive, ou par une inscription symbolique, ou par le chant du poète, notre esprit devient attentif, comme si elle allait nous révéler tous les secrets du passé et toutes les lois de l’avenir.

La seconde famille s’avance sur le littoral de la mer Noire, le long de la mer Caspienne. Elle touche d’un côté à la Sibérie, de l’autre au Pont-Euxin, et c’est là que les Scandinaves plaçaient leur Asgaard, la demeure de leurs dieux. Comme un fleuve qui déborde, elle s’étend au nord et