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échange sa vie oisive de Naples. » — Manger du macaroni, écouter les histoires des improvisateurs, dormir sur les quais, habiter le grand escalier ou le portique d’une église, n’avoir ni maison, ni lit, ni foyer, manquer même de chemise, voilà son existence, et il ne se trouve point malheureux.

Il y a différens genres de chants populaires : le chant guerrier qui célèbre les héros et décrit les batailles, le chant nuptial, le chant funèbre, la complainte ; le chant historique qui transmet la gloire des ancêtres ; le chant religieux, le chant d’amour, et plusieurs autres qui sont en rapport avec les divers évènemens heureux ou malheureux de la vie.

Quant au chant guerrier et patriotique, on en trouverait difficilement quelque trace chez une nation qui a vu succomber son indépendance et sa liberté tantôt dans les invasions des peuplades asiatiques, des empereurs d’Allemagne, des armées françaises, tantôt dans les luttes intérieures des princes, des ducs et des doges. Le morcellement d’un pays tue le patriotisme de ses habitans ; avec le patriotisme doit nécessairement mourir la poésie, qui en est le langage. Mais la naïveté, la finesse, l’esprit satirique du peuple italien, sa vive imagination, ses brûlantes amours, ses superstitions, son scrupuleux attachement à toutes les cérémonies du culte catholique, tous ces traits caractéristiques sont restés une source inépuisable de poésies populaires.

Comme ce fut toujours un des principes du gouvernement pontifical de marier le culte catholique à la vie ordinaire du peuple, afin d’arriver à former un état purement théocratique, il en est résulté qu’il n’est point de fêtes ni de pratiques de religion qu’il n’ait su rattacher aux plaisirs populaires, ayant soin chaque fois de les entremêler de processions, d’illuminations, de feux d’artifice, et surtout de bon nombre d’indulgences et de lettres de grâce pour vingt-cinq et cinquante ans, ou même pour des siècles entiers. Parmi ces fêtes, il faut remarquer la merveilleuse illumination de l’église Saint-Pierre, qui paraît prendre feu tout à coup depuis les colonnes les plus rapprochées du sol jusqu’au faîte de la croix qui décore la coupole. Une autre solennité qui n’est pas moins remarquable, et qui se rattache à la première, c’est le