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LA VEILLÉE DE VINCENNES.

debout. Mais en tombant, ça pouvait écraser quelqu’un, au lieu qu’à présent quand ça tombe, ça n’écrase personne.

— C’est égal, je suis toujours bien aise, dis-je.

— C’est-à-dire, aurais-je dit, car le caporal vint donner un si terrible coup de crosse dans la canne de mon ami Michel, qu’il l’envoya là-bas, tenez, là-bas, près de la poudrière.

En même temps il ordonna six jours de salle de police pour le factionnaire qui avait laissé entrer un bourgeois.

Sédaine comprit bien qu’il fallait s’en aller. Il ramassa paisiblement sa canne, et en sortant du côté du bois, il me dit :

— Je t’assure, Mathurin, que je conterai tout ceci à la reine.

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viii.
Une séance.


Ma petite Pierrette était une bonne fille, d’un caractère décidé, calme et honnête. Elle ne se déconcertait pas trop facilement, et depuis qu’elle avait parlé à la reine, elle ne se laissait pas aisément faire la leçon. Elle savait bien dire à monsieur le curé et à sa bonne qu’elle voulait épouser Mathurin, et elle se levait la nuit pour travailler à son trousseau, tout comme si je n’avais pas été mis à la porte pour long-temps, sinon pour toute ma vie.

Un jour (c’était le lundi de Pâques, elle s’en était toujours souvenue, la pauvre Pierrette, et me l’a raconté assez souvent), un jour donc qu’elle était assise devant la porte de monsieur le curé, travaillant et chantant comme si de rien n’était, elle vit arriver vite, vite, un beau carrosse, dont les six chevaux trottaient dans l’ave-