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POÈTES ET ROMANCIERS ANGLAIS.

même l’absence de son style ; peut-être que si un nouveau Boswell nous le montrait partagé entre les clubs politiques, les querelles de parlement et la chasse au renard, pariant à New-Market sur le jarret d’un cheval pur sang ; parcourant les rues de Bath et de Brighton dans un élégant tandem, menant enfin une existence seigneuriale, nous trouverions tout naturel qu’il jette à la hâte ses idées sur le papier, et qu’il prenne pour nécessaire une expression soudaine.

Mais par malheur ces hypothèses ne sont pas même des conjectures. Nous ne savons rien de l’auteur de Pelham. Bien qu’il siége à la chambre des communes, il ne paraît pas qu’il ait jamais joué aucun rôle politique ; nous pouvons seulement conclure des éloges de la critique écossaise qu’il doit être whig et réformiste. Autrement, comme les Quintilien d’Édimbourg ne pardonnent pas au torysme, ils eussent fait à M. Bulwer une vive et rude guerre ; car le plus souvent, chez nos voisins, au fond de la plupart des controverses littéraires, il y a un levain théologique ou politique.

Après tout, la paresse ou l’absence de résolution et de volonté n’ont pas besoin, pour se développer, d’équipages, de meutes et de haras. Il y a des cerveaux organisés de façon à ne jamais vouloir qu’à moitié, dans quelques conditions qu’il soient placés. Il y a des oisifs sans fortune plus entêtés dans leur indolence que des heureux.

Seulement, et pour conclure, il serait fort à souhaiter que M. Bulwer voulût prendre sur lui d’écrire à l’avenir d’un style plus serré, plus concis, moins incorrect et moins vague, moins rempli de taches sombres, puis éclairé parfois de brillantes étincelles, moins semblable à du sable semé de parcelles d’or, et digne enfin d’être comparé aux plis majestueux d’un manteau de pourpre.


gustave planche.