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RÉVOLUTION POLONAISE.

provisoire ; sans prendre sa place accoutumée, il prononça les paroles suivantes : « Ma conscience m’ordonne de vous déclarer que je n’ai d’autre projet que de conserver l’intégrité du royaume de 1815, car je suis intimement convaincu qu’il est impossible de vouloir plus sans exposer notre petite armée à une boucherie. J’ai juré fidélité à Nicolas, et je serai fidèle à mon serment ; qu’on ne croie donc pas que je veuille reconquérir celles de nos provinces qui appartiennent à la Russie. Du reste, la constitution aura désormais de telles garanties, qu’elle ne pourra plus être violée, et le royaume sera fermé aux troupes russes. Je ne m’engage à rien de plus ; je ne promets rien de plus ; telle est ma profession de foi, elle est franche et immuable. »

À ces étranges paroles, la consternation fut générale. Czartoryski parla dans un sens contraire ; mais pour toute réponse, le dictateur répéta sa terrible profession de foi. Zwierkowski, député de Varsovie, voulait aussi prendre la parole, mais il l’en empêcha avec hauteur : « C’est pour dire ce que je pense, et non pas pour disputer que je suis venu ici, » dit-il, et il sortit brusquement.

« Il n’y a rien là de nouveau pour moi, s’écria Lelewel, mais je dois déclarer aussi que j’ai toujours entendu dire au dictateur, que, si la guerre défensive nous était favorable, il saurait profiter de la victoire, et ne mettrait aucune borne à ses prétentions. » Ces paroles firent espérer qu’une fois la guerre commencée, le dictateur sortirait de son apathie, et adopterait les principes de la révolution. Il fut convenu qu’on jetterait un voile sur sa profession de foi pour ne point affaiblir la confiance que la nation avait en lui. Ainsi, cette séance resta ignorée du public jusqu’à la fin de la seconde dictature.

Chlopicki voulait, d’après son système de légalité, ouvrir lui-même la diète, nommer le maréchal (président), et ensuite abdiquer ses pouvoirs ; mais il ne dit pas un mot de ses projets dans l’acte de convocation de la diète. Pour le jour d’ouverture, le gouvernement provisoire lui con-