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LITTÉRATURE.

peut recourir à de pareils moyens pour sauver sa vie aurait peur devant l’échafaud… Tu ne déshonores que toi-même en vivant lâchement, tu nous déshonorerais tous par une fin honteuse…

D. Louis.

Casterey !… Rends grâce à d’anciens souvenirs d’amitié, rends grâce aux alguazils qui nous ont enlevé nos épées, rends grâce surtout à l’état de faiblesse où t’a mis la torture. Ce n’est pas trop de tout cela pour empêcher que je n’étouffe dans ta gorge tes paroles avec la vie. J’ai mis plus d’une fois la main sur mon poignard ; et si je ne m’étais retenu, j’aurais justifié tes injures, j’aurais assassiné en lâche un homme sans armes. Mais tiens. (Il brise la lame de son poiguard.) Tu peux recommencer maintenant ! Peux-tu me soupçonner, moi qui, riche, à la veille de faire le plus beau mariage du royaume, et pouvant vivre long-temps et heureux, ai préféré me jeter, pour mourir, dans votre folle conspiration ; moi qui ai flétri publiquement la nièce du plus puissant et du plus vindicatif gouverneur de toute l’Espagne ? Mais là a commencé mon crime : j’ai dit une calomnie.

Casterey.

Tu sais trop bien que ce n’en est pas une ; et d’ailleurs, quelle preuve en aurais-tu ?

D. Louis.

Mon amour ; et je suis décidé à tout réparer.

(Entre le geôlier, qui remet une lettre à don Louis.)
Casterey.

Tiens, voici ta grâce qu’on t’apporte.

D. Louis.

Ma grâce !… je la déchirerais…

Casterey, d’un air incrédule.

Toi !…

D. Louis.

Homme implacable, prends toi-même, et déchire-la.

(Il lui donne la lettre cachetée.)