Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 2.djvu/463

Cette page a été validée par deux contributeurs.
453
FORMULE GÉNÉRALE DE L’HISTOIRE.

poésie, par ses institutions immuables où s’anéantit toute personnalité, qui demandent leur sanction à la croyance, non à la raison, à l’assentiment individuel, l’antiquité orientale exprime un principe immuable, substantiel, une révélation primitive restée frappée d’immobilité :

À Rome, le patriciat exprime encore le même principe ; mais en face de lui et pour lutter contre lui naît au sein du plébéianisme un principe actif, individuel.

En Grèce, les deux principes se retrouvent encore en présence ;

Seulement, au lieu d’exister au sein de deux castes superposées l’une sur l’autre, chacun s’est retranché dans une ville où il règne exclusivement : Sparte, représentant l’Orient, est l’asyle du principe stationnaire ; Athènes est le trône du principe actif, individuel, elle annonce nos temps modernes ; et autour de ces deux villes se groupent les autres villes de la Grèce, suivant le degré d’affinité que leur constitution politique leur donne avec l’une ou l’autre : on peut surtout le remarquer dans la guerre du Péloponèse.

Enfin notre Europe moderne, par des caractères en tout l’opposé de l’Orient ; des sciences qui renoncent à l’inspiration, à l’intuition ; une poésie, expression de sentimens individuels ; des religions qui ont laissé à la pensée la liberté dans tous les sens ; des institutions qui toujours se rapportent aux individus ; des institutions politiques qui s’adressent à l’assentiment, quelles que soient d’ailleurs leurs formes ; l’Europe moderne représente à un haut degré un principe actif, personnel, la raison individuelle.

À ce point de vue, l’humanité se montre à nous dans sa majestueuse individualité.