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FORMULE GÉNÉRALE DE L’HISTOIRE.

et dans l’avenir : ils ont conquis pour toujours la société civile.

Puis enfin, à une troisième époque, ils pénètrent dans la société politique, ils entrent en partage des dignités sociales, et imposent aux patriciens superbes le joug pesant de l’égalité, et alors le patriciat s’annule, se dissout dans le sein du plébéianisme : sa mission est terminée.

Tant que dure cette mission des patriciens, c’est à eux à marcher en tête des sociétés humaines, aux plébéiens à les suivre, comme une troupe de néophites, subissant l’épreuve, attendant l’initiation. Mais, si les patriciens trahissent cette mission, s’ils font de l’ordre social une cité inaccessible, méconnaissant le droit d’asile, alors la guerre est substituée à l’épreuve, la conquête à l’initiation, et le plébéianisme entre dans la cité, tumultueusement rangé autour de quelque chef inconnu, surgi tout à coup du milieu de la foule, qui aura saisi d’une main hardie la hache des révolutions et l’étendard de l’émancipation ; car le plébéianisme ne peut reculer. Le plébéianisme est le symbole de l’humanité se faisant elle-même. Au spectacle de ces luttes sanglantes, retracées dans l’histoire, ne sentons-nous pas par tous nos instincts, par notre foi dans son triomphe, qu’il y a là l’accomplissement d’une grande loi providentielle ?

M. Ballanche ne nous dit pas encore, ce me semble, pourquoi les épreuves sont ainsi différentes pour deux classes d’hommes, à quel titre on naît patricien ou plébéien : toutefois on peut présumer dès à présent que, dans le système de l’auteur, le partage des classes et des castes est un moyen d’initiation, qu’il tient au brisement de l’unité primitive, qu’il est préparatoire, et