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VOYAGES.

talité grecque offre à l’étranger, et que la maîtresse de la maison doit toujours servir de ses propres mains.

Canaris nous accueille avec une assurance modeste. Je lui parle de David et du désir que ce sculpteur habile m’a témoigné de pouvoir un jour buriner ses traits : le front du héros s’incline en rougissant. Il nous entretient et nous remercie des bienfaits dont le comité grec et quelques philellhènes l’ont comblé. Je lui parle de ses exploits, de l’admiration dont l’Europe l’environne ; il a fait bien peu, nous répond-il, pour mériter un tel honneur.

Ou je me trompe, ou cet homme est aussi bon et aussi modeste qu’il est brave et généreux. Pourvu du gouvernement de Napoli de Malvoisie, il avait dernièrement résigné sans regret ce commandement important, disant qu’il était propre à conduire un navire, mais qu’il n’entendait rien au gouvernement d’une cité. Au nom de son fils, qui habite Paris, et que nous devons bientôt rejoindre, son œil brille humide d’une larme ; il nous conjure de le voir et de lui recommander de n’oublier jamais ni sa langue, ni son père, ni son pays. Νὰ μη ξέϰάσι τον πάτερὰ του τὴν γλόσσαν του οὐδε τον τοπον του.

À présent nous pouvons partir pour Athènes  ; quand nous saluerons les cendres de Thémistocle, ensevelies sur ces glorieux rivages[1] témoins du désastre de Xerxès, nous pourrons réjouir les mânes du héros avec le nom d’un Grec digne de lui et de Salamine.

« Au Pyrée ! au Pyrée ! » s’écrient mes compagnons de voyage[2] dans leur classique enthousiasme, « vous

  1. Pausan. i, § i. — Plut. Arist. § 7.
  2. MM. le baron A. de C., ministre plénipotentiaire de France près la