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les courages : leur variété, leur bizarrerie, leur force étonnent encore quiconque sait se souvenir et se souvient d’avoir cru. Le vieux proverbe allemand a raison :

 
Kommt der Krieg ins Land,
Dann gibt’s Lügen wie Sand[1].

L’idée d’étudier ces singulières efflorescences de l’imagination collective est déjà venue à plus d’un auteur, préoccupé de psychologie ou d’histoire. Nous allons parcourir les principaux travaux dont les fausses nouvelles de guerre ont été l’objet.


II

La littérature de guerre est immense et, pour bien des raisons, d’un dépouillement malaisé. Dans ce que je connais d’elle, quatre études relatives à la fausse nouvelle me paraissent devoir être retenues [2].

Voici d’abord le livre du docteur Lucien Graux, Les Fausses Nouvelles de la Grande Guerre. Ce sont sept forts volumes parus de 1918 à 1920. Ils ont été très habilement lancés en librairie ; c’est ce qui oblige à insister sur eux plus longuement peut-être que sans cela il n’eût été nécessaire. Le titre est plein de promesses ; mais la lecture déçoit. Ni par la documentation, ni par la façon de poser les problèmes, cette vaste compilation ne satisfait l’historien.

  1. Cité par F. van Langenhove, Comment naît un cycle de légendes (cf. plus loin, p. 24), p. 1.
  2. Les auteurs d’ouvrages relatifs à la psychologie du soldat, tels que Huot et Voivenel, La Psychologie du soldat, in-12, Paris, 1918, ou Georges Bonnet, L’Ame du soldat, in-12, Paris, 1917, ont, en général, complètement laissé de côté l’aspect de la psychologie de guerre qui nous intéresse ici. Les indications données par G. Lebon, Enseignements psychologiques de la guerre européenne, in-12, Paris, 1916, sont tout à fait insuffisantes. — Un financier allemand, William-Lewis Hertslet, publia, pour la première fois en 1882, sous le titre de Der Treppenwitz der Weltgeschichte (L’Esprit de l’escalier dans l’histoire universelle), une sorte de corpus des erreurs historiques courantes. Il en a été depuis donné de temps en temps de nouvelles éditions, revues et augmentées. La dernière en date (9e éd., in-8, Berlin, 1918), due aux soins du Dr Helmolt, renferme un chapitre intitulé : Der Weltkrieg ; il est très court et parfaitement insignifiant. Le Dr Helmolt y signale l’apparition — en 1917 — d’une revue intitulée : Archiv für Kriegsseelenkunde et émanant du Séminaire de Science des Littératures (Literaturwissenschaftliche Seminar) de l’Université de Kiel ; je n’ai pu la consulter.