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rité et le placent dans un état d’infériorité qui l’empêche de conclure des contrais équitables, c’est sur ces constatations et d’autres similaires que le socialisme se fonde pour réclamer la réforme de l’ordre actuel. En somme, c’est aux pays de grande industrie et à eux seuls qu’il s’en prend et, dans ces pays, c’est exclusivement les conditions dans lesquelles fonctionnent l’échange et la production des valeurs qu’il attaque. — Tout autre est le principe des communistes. Leur idée fondamentale, qui revient partout la même sous des formes à peine différentes, c’est que la propriété privée est la source de l’égoïsme et que de l’égoïsme découle l’immoralité. Or une telle proposition ne vise aucune organisation sociale en particulier. Si elle est vraie, elle s’applique à tous les temps et à tous les pays ; elle convient aussi bien au régime de la grande que de la petite industrie. Elle ne vise même aucun fait économique, car l’institution de la propriété est un fait juridique et moral, qui affecte la vie économique, mais sans en faire partie. En somme, le communisme tient tout entier dans un lieu commun de morale abstraite, qui n’est d’aucun temps ni d’aucun pays. Ce qu’il met en question, ce sont les conséquences morales de la propriété privée en général, et non, comme fait le socialisme, l’opportunité d’une organisation économique déterminée que l’on voit apparaître à un moment précis de l’histoire. Les deux problèmes sont tout différents. D’un côté, on se propose d’estimer la valeur morale de la richesse, in abstracto, et on la nie ; de l’autre, on se demande si tel type de commerce et d’industrie est en rapports avec les conditions d’existence des peuples qui le pratiquent, s’il est normal ou morbide. Aussi, tandis que le communisme ne s’occupe qu’accessoirement des arrangements économiques proprement dits et ne les modifie que dans la mesure nécessaire pour les mettre d’accord avec son principe, l’abolition de la propriété individuelle, le socialisme, inversement, ne touche à la propriété privée qu’indirectement, dans la mesure où il est nécessaire de la changer pour la mettre en harmonie avec les réarrangements économiques qui sont l’objet essentiel de ses revendications.

C’est là, d’ailleurs, ce qui explique la grande différence que nous avons signalée dans la manière dont l’un et l’autre système se manifestent historiquement. Les théoriciens du communisme, disions-nous, sont des solitaires qui ne se montrent que de loin en loin et dont la parole semble même n’éveiller que de faibles