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revue de métaphysique et de morale.

temps à la fois et hors du temps, mesure du changement comme de la permanence, type de l’identité[1]

Maintenant si, pour la synthèse de la diversité dans l’étendue, il faut l’addition, et si l’addition n’est possible que dans le temps, pour réaliser l’addition elle-même à travers la continuité de l’étendue, ne faut-il pas le passage continu d’une extrémité à l’autre par toutes les divisions intermédiaires ? Ce passage est le mouvement, le mouvement que j’accomplis immobile, du sein de mon identité[2].

De plus, les parties de l’espace ont leur ordre ; le mouvement a sa direction, réglée sur l’ordre des parties. Pour me représenter la synthèse de la diversité dans l’espace, non seulement il faut que je sois le sujet substantiel qui accomplisse le mouvement, au moins par l’imagination : il faut encore que j’en conçoive, que j’en marque la fin, et que j’en veuille la direction.

L’étendue est donc pour l’entendement la condition du développement de la quantité, et le mouvement la forme nécessaire de la synthèse de la quantité. Rien ne nous est distinctement intelligible que ce que nous pouvons nous figurer dans le champ de l’imagination ; nous ne concevons rien en effet d’une manière distincte que nous ne nous décrivions en effet à nous-même, dans un espace imaginaire[3]. Et dans toute conception distincte est enveloppée par cela même la conscience, plus ou moins obscure, de l’activité volontaire, et de la personnalité.

Mais dans ces termes le mouvement est encore une généralité indéterminée. Tout mouvement réel a sa quantité. Ce n’est pas l’étendue, ni la vitesse toute seule ; c’est le degré même de sa réalité, dont la vitesse et l’amplitude ne sont que le résultat et le signe : c’est l’intensité. Or, l’intensité, le degré de la réalité, n’a sa mesure directe que dans l’énergie de la cause, dans la force. D’un autre côté, si la force est à elle-même sa mesure, elle se mesure aussi, elle mesure du moins et proportionne son énergie actuelle à la résistance qu’elle doit vaincre. Le mouvement est la résultante de l’excès de la puissance sur la résistance. Le rapport et la mesure de la puissance et de la résistance est dans la conscience de l’effort.

Enfin, si le sujet qui s’oppose à l’objectivité de l’étendue ne se connaît que dans l’action par laquelle il imprime le mouvement, et si

  1. Cf. Kant, loc. cit.
  2. Aristot., loc. cit., Kant, loc. cit.
  3. Kant, ibid.