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adapter, mentalement ou physiquement, à quelque réalité : What meaning, indeed, can an idea’s truth have save its power of adapting us either mentally or physically to a realily ?

Si l'on veut, d’un mot, désigner la doctrine qui, pour le philosophe, se dégage de la science, il semble, estime James, qu’il convient de l’appeler Pragmatisme (de pragma, action, fait), par opposition à conceptualisme ou rationalisme abstrait. La science, en effet, subordonne les idées aux faits, et non les faits aux idées. Pour elle, la réalité n’est pas fonction de la vérité, mais c’est la vérité qui est fonction de la réalité.

Si tel est le critérium de l’idée vraie, peut-on dire que celle-ci trouve place dans l’expérience psychologique ou religieuse, comme elle se réalise incontestablement dans le domaine de l’expérience physique ? De bonne heure l’attention de William James s’était portée sur ce problème capital. L’un de ses premiers écrits philosophiques fut une lettre qu’il adressa aux rédacteurs de la « Critique philosophique », en 1878, sous ce titre : Quelques considérations sur la méthode subjective. Il s’y inscrit en faux contre la prétention de juger de la vérité d’après quelque concept abstrait, et non d’après l’expérience vivante et réelle de l’homme lui-même. Il se rapprochait en cela, disait-il lui-même, des principes philosophiques professés par Renouvier et Pillon ; et il se plut à manifester cette affinité lorsqu’il publia ses Principes de Psychologie (1890), en inscrivant au frontispice de l’ouvrage la dédicace dont voici la traduction : « A mon cher ami François Pillon, en gage d’affection, comme de reconnaissance pour ce que je dois à la « Critique philosophique ».

Les vues qu’il proposait en 1878 furent de plus en plus confirmées par sa réflexion. Soit, en effet, la définition pragmatique de la vérité à laquelle conduit l’examen de la science : il n’y a nulle raison de supposer que l’idée vraie soit exclue de l’expérience psychique et de l’expérience religieuse comme telles ; car, en fait, l’emploi de certains moyens psychiques ou religieux peut tout aussi bien conduire au résultat cherché que l’emploi de moyens purement physiques. Un mouvement peut être produit par un autre mouvement ; mais une idée et même un mouvement peuvent, selon ce que nous enseigne l’expérience, être produits également par une idée. Nous n’avons nul besoin, pour savoir si telle idée peut être efficace, de