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H. POINCARÉ. — À propos de la Logistique.

D’autre part, M. Russell est d’accord avec moi au sujet du cercle vicieux, source des paradoxes en question.

Je ne veux pas discuter à fond la théorie pas de classes, j’attends pour cela de la mieux connaître ; jusqu’ici il ne me semble pas qu’elle ait rendu aux raisonnements de Cantor la rigueur qui leur manque. Mon impression est que M. Russell répète textuellement ce qu’a dit Cantor et se borne, pour calmer ses propres scrupules à s’écrier de temps en temps : Messieurs, n’oublions pas que toutes ces choses dont nous parlons ne sont pas des entités et que nous n’avons pas le droit d’en parler. Mais ce n’est là qu’une impression que la lecture de l’ouvrage définitif modifiera peut-être.

Que dire maintenant du principe d’induction, objet principal du débat ? Pour éviter toute espèce de confusion, introduisons deux définitions et une proposition.

Définition A. Un nombre fini est un nombre cardinal tel que .

Définition B. Un nombre inductif est un nombre qui fait partie de toutes les classes récurrentes.

Proposition C. Tout nombre fini est inductif.

Pour M. Russell, c’est la définition B qui est le principe d’induction, et en partant de cette définition, il a cherché à démontrer la proposition C.

Pour moi, c’est la proposition C qui est le principe d’induction ; cette proposition n’est pas une définition et elle est indémontrable (cet énoncé nouveau du principe d’induction n’est pas le même que ceux que j’ai proposés antérieurement ; mais il leur est équivalent et il me semble préférable).

À la façon de voir de M. Russell, j’ai objecté que la définition B, pouvant impliquer un cercle vicieux, ne peut être appliquée que sous certaines restrictions, et que ces restrictions ne permettent pas l’emploi qu’il en fait. Que dit maintenant M. Russell ? Il observe d’abord que les doutes qu’il a émis lui-même, dans un article précédent, venaient de l’impossibilité d’établir l’axiome multiplicatif (dit de Zermelo). Cela, c’est une autre objection à sa démonstration. Mais la mienne en est-elle moins bonne ? Non, sans doute, car M. Russell ajoute : « Son objection, que cette preuve enveloppe un cercle vicieux, est formellement vraie suivant la théorie soutenue ci-dessus. » « Mais, continue M. Russell, ce paralogisme peut être évité si nous admettons une certaine assomption qui est requise pour