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lise donc, sauf le premier stade signalé dans l’article 5, à savoir le mode d’activité propre au vouloir, l’initiative, qui est alors une inhibition.

9o Il arrive que l’action, pour atteindre la fin dominante qu’implique le motif prépondérant, requiert plusieurs étapes dont chacune a sa fin propre. Dans ce cas, le plus fréquent, le processus de l’action comporte plusieurs fins intermédiaires. Par exemple : après délibération un débiteur prend la résolution d’adresser une demande de délai à son créancier ; il faudra qu’il prenne sa plume, qu’il la trempe dans l’encre, qu’il écrive, qu’il plie sa lettre et la porte à la poste, autant de fins intermédiaires à atteindre avant celle qui consiste dans l’obtention du délai. Encore faut-il noter que cette fin n’est réellement pas la dernière ; qu’elle est un autre motif intermédiaire par rapport au mobile, qui est le motif foncier, seul vraiment prépondérant, à savoir le besoin général de tranquillité, spécialisé dans le désir de différer le paiement d’une dette. Il y a de même un mobile à l’origine de toute action.

Tels sont, ce me semble, tous les facteurs de l’action voulue, considérée dans son entière complexité. Mais, dans la pratique, ils ne sont pas tous également conscients chez l’agent ; plusieurs peuvent même être inconscients. Depuis l’action tout entière et la plus réfléchie où le vouloir est le plus éclairé, jusqu’à celle où le vouloir spontané confine à l’instinct, on conçoit un nombre indéfini de degrés.

De ces neuf facteurs les seuls qui engagent le libre arbitre sont les sept derniers, et c’est le cinquième, la volition, qui est la raison d’être des six autres de ceux-ci et qui les régit. Je vais donc l’examiner de mon mieux.

Parmi les variations dont je suis le sujet, il en est un grand nombre qui se révèlent à moi comme subies, reçues par moi. Je m’en reconnais le sujet tout passif : telles sont, par exemple, mes sensations brutes, qui suivent immédiatement les impressions du monde extérieur sur mes nerfs sensitifs. Il y en a d’autres qui me semblent moitié reçues, moitié formées par moi-même. Telles sont mes perceptions composées de sensations élémentaires : ce sont des synthèses que je discerne après plus ou moins de tâtonnements, comme lorsque par mon attention je reconnais et spécifie un troupeau dans une masse mouvante et d’abord confuse de formes lointaines qui se sont rapprochées de moi, ou lorsque je compose des visages humains