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conscience, quelque chose répond aux modifications conscientes du moi. Le doute à cet égard n’influe pas sur le résultat de mes recherches.

II

La différence en moi, si minime soit-elle, entre le sommeil supposé sans rêve (le sommeil complet) et le rêve ou la veille, est ce que j’appelle un état conscient. Une sensation (toucher, odeur, saveur, son, couleur), un sentiment, une idée, etc., sont des états conscients. La conscience spontanée est l’aptitude à affecter ces états ; je ne peux que la désigner au lecteur d’après mon expérience personnelle, sans la définir, car elle est sui generis. La conscience spontanée ne se borne pas à être passive ; elle est, dans certaines fonctions, active en cela que non seulement j’éprouve des sensations et des sentiments, non seulement je suis, en quelque sorte, le miroir des choses, mais encore j’exerce spontanément mon activité mentale sous les noms d’intelligence, raison, pensée, pour comparer, abstraire, raisonner, juger. Il y a plus : je peux constater que je sens et que j’agis mentalement. Ce dernier mode de la conscience qui se superpose, en quelque sorte au premier (en allemand uberdenken, penser par-dessus) je l’appelle la conscience réfléchie. Je ferai remarquer enfin que la conscience réfléchie peut s’exercer soit sur un état conscient présent, soit sur le souvenir de celui-ci : je peux m’observer sentant, pensant, voulant, et je puis observer en moi les souvenirs respectifs de ces états conscients.

C’est au moyen de l’analyse et de la critique rationnelle, exercées par les divers modes de connaissance sur le libre arbitre tel que le donne la conscience spontanée passive, c’est par ce double procédé que je tâcherai de prouver la réalité de celui-ci.

III

L’existence des changements extérieurs au moi est révélée à l’homme par les étals sensibles (sensations tactiles, visuelles, auditives, olfactives, etc.) qu’ils provoquent dans sa conscience en impressionnant les nerfs sensitifs ; les états de conscience sont, à proprement parler, des phénomènes au sens étymologique du mot ; ils sont, chez l’observateur, les signes des changements extérieurs au moi. À ce titre les phénomènes constituent les matériaux de la