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revue de métaphysique et de morale.

I

Avant tout, il convient de ne pas confondre la Logistique avec ce que M. Poincaré appelle « la Logique de M. Hilbert ». Cette confusion, M. Poincaré ne l’a pas faite, mais beaucoup de ses lecteurs pourraient la faire, en le voyant associer ces deux doctrines dans une même discussion et dans une commune condamnation. Or il faut bien savoir que M. Hilbert est complètement étranger à la Logistique, et n’a jamais employé pour ses recherches un calcul logique quelconque. Si donc les critiques que M. Poincaré lui adresse sont justes, elles ne portent aucunement contre la Logistique ; elles tendraient même plutôt à prouver la supériorité de celle-ci sur le raisonnement verbal et de simple bon sens.

Il importe aussi de prévenir une erreur historique que pourrait engendrer la phrase suivante de M. Poincaré : « Ce que Hilbert avait fait pour la Géométrie, d’autres ont voulu le faire pour l’Arithmétique et pour l’Analyse » (p. 816-7). On pourrait croire, en lisant cette phrase, que les logisticiens se sont attaqués à l’Arithmétique et à l’Analyse après les travaux de M. Hilbert sur la Géométrie, et à son imitation. Les Grundlagen der Geometrie de M. Hilbert sont de 1899. Or dix ans auparavant (1889) M. Peano avait publié, non seulement ses Arithmetices principia nova methodo exposita, mais aussi I Principi di Geometria logicamente esposti, rédigés tous deux dans le symbolisme qu’il avait inventé l’année précédente. En 1891, il publiait dans la Rivista di matematica (t. I) deux articles Sul concelto di numero, contenant déjà les 5 axiomes fondamentaux de l’Arithmétique ; en 1894, il publiait dans la même Revue (t. IV) le mémoire Sui fondamenti della Geometria que j’ai analysé dans Les Principes des Mathématiques, chap. vi, § C (Géométrie descriptive). Enfin, c’est en 1898 et 1899 que M. Pieri a publié sa reconstruction logique de la Géométrie projective et de la Géométrie métrique dans les Mémoires de l’Académie des Sciences de Turin. Ces dates suffisent à prouver que, si M. Hilbert n’a pas voulu profiter des travaux des logisticiens, ceux-ci n’ont pas pu profiter des siens, et n’ont pas eu besoin de son exemple, non seulement en Arithmétique et en Analyse, mais même en Géométrie. M. Poincaré commet donc une inexactitude historique en attribuant aux « travaux de M. Hil-