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revue de métaphysique et de morale.

ne voit pas comment il peut faciliter la comparaison elle rapprochement du concept et de l’image.

D’autre part, si le nombre est le schème de la grandeur, il semble que le concept que le nombre représente soit le concept d’une grandeur. Mais qu’est-ce qui fait que le nombre représente telle grandeur plutôt que telle autre ? C’est qu’il exprime le rapport de cette grandeur à la grandeur-unité de même espèce ; or le choix de cette unité est comiplètement arbitraire. Il n’y a donc dans la notion d’une grandeur rien qui indique qu’elle doive avoir pour « schème » tel nombre plutôt qu’un autre. De plus, si la grandeur est un concept, et si elle ne peut être schématisée que par le nombre, que devient la théorie kantienne suivant laquelle toute grandeur est intuitive, et revêt nécessairement la forme de l’espace et du temps ? Enfin, quel est le rapport du nombre, en tant que schème, avec les « schèmes » des figures géométriques ? On dira sans doute que le nombre est un schème temporel, tandis que les schèmes géométriques sont spatiaux. Pourtant, Kant admet que le nombre a pour image cinq points alignés ; or, si l’on généralise ce procédé de construction, on obtiendra un schème spatial du nombre  ; et d’autre part, la construction des figures géométriques étant successive selon Kant, les schèmes géométriques doivent impliquer aussi le temps. On ne voit donc pas ce qui distingue le nombre des schèmes géométriques, ni en quoi l’Arithmétique diffère de la Géométrie, tant par sa méthode que par son objet. Et pourtant tout le monde sent la différence qu’il y a entre les nombres et les figures géométriques ; les premiers sont plus abstraits, plus généraux, plus intellectuels, et ont une portée universelle : tout obéit aux lois du nombre, tandis que tout ne tombe pas sous les prises de la Géométrie. En résumé, si le nombre est un schème, il ne peut être le schème, ni du nombre, ni de la grandeur, de sorte qu’on ne sait pas de quoi il est le schème.

Le nombre el la grandeur.

D’ailleurs, il est difficile de se faire une idée précise de la théorie de Kant sur la grandeur et ses rapports avec le nombre. En principe, la grandeur est une catégorie, c’est-à-dire un concept a priori de l’entendement[1] ; elle a pour schème le nombre, et pour image

  1. Il ne faut pas oublier que, si la quantité est une catégorie, c’est en vertu d’un véritable jeu de mots : car !a quantité logique (qui est l’origine et le fon-