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E. CHARTIER. — Vers le positivisme absolu par l’idéalisme.

théorie des vecteurs en résumé, et qu’elle comprend aussi la représentation des points par leurs projections sur des axes. Il s’agit donc ici d’une découverte importante, et dont les conséquences sont fort étendues. Et voilà une raison, entre beaucoup d’autres, pour laquelle je ne puis croire que la réflexion sur les méthodes ait toujours été inutile au savant.

De même, en ce qui concerne l’histoire des sciences dans l’avenir, je ne puis croire qu’elles se passent jamais d’un petit nombre de règles ou d’idées fondamentales qui font que le mot Raison n’est peut-être pas un mot vide de sens. La vérification de l’arithmétique et de l’algèbre prouve la valeur de certaines combinaisons d’idées. Soit ; mais ces combinaisons sont elles-mêmes réglées et garanties par des nécessités permanentes, sans lesquelles l’idée même de ces combinaisons n’aurait pu être formée. La géométrie peut prendre mille formes, et nous étonner encore bien des fois ; elle n’ira pourtant jamais jusqu’à conclure que deux points ne peuvent pas toujours être mis en relation immédiatement, ou, si l’on veut, n’appartiennent pas toujours à un même espace ; elle n’ira donc jamais jusqu’à se passer de la notion de droite. Si l’on veut employer d’autres mots, un peut dire aussi que tous les espaces, comment qu’on les définisse seront toujours dans le même espace, ou en d’autres termes, qu’ils pourront être conçus et comparés dans une même conscience. De même la pure science du nombre, si abstraite et si purifiée qu’on la suppose, ne peut se passer de la notion d’ordre fixe entre les termes d’une série, ce qui rend ces hautes spéculations elle-mêmes tributaires de la notion d’espace.

Il semble done que notre machine à compter et à raisonner comporte, en dehors des conventions, des hypothèses, et des idées définies, un mécanisme qui assure d’avance, sauf des erreurs dont nous connaissons d’avance la nature, l’identité des résultats pour les mêmes données. De sorte que tout n’est pas remis en question à chaque opération nouvelle. Nous savons très bien que si un nouvel opérateur trouve en faisant une addition une somme différente de celle que nous avons trouvée, ce ne sera pas parce que, l’intuition de l’espace manquant soudain, la somme de deux nombres ou leur synthèse en un tout n’aura pas pu être faite. Il y aurait donc des règles du devenir des idées, et tout de même une anticipation sur ce que sera la science, du moins dans sa forme. Et M. Weber ne peut s’empêcher de le reconnaître : « Nous ignorons si les vérités syn-