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revue de métaphysique et de morale.

Venons à la Séance générale, où MM. les professeurs Gourd et Stein ont traité de la Définition de la Philosophie. Nous avons l’habitude de lire, au commencement de toute étude, une définition de cette étude, et des considérations sur la méthode à suivre. Il est pourtant évident que, pour toute science, il a bien fallu la faire, au moins en partie, avant d’examiner comment on l’a faite, et comment on peut la définir. Il est donc assez artificiel de parler uniquement de définition et de méthode, sans donner aussitôt à l’appui de cette méthode et de cette définition, un exemple aussi achevé que possible. Les communications faites sous ce titre, ont donc plané un peu trop haut, si l’on peut dire ; elles ont paru trop abstraites, comme il était inévitable ; ceux qui ont une manière de chercher et qui s’y tiennent, n’ont pas eu de peine, il faut l’espérer, à lire leur propre opinion dans des discours faits justement pour concilier autant que possible toutes les opinions ; ceux qui étaient en quête d’une méthode la cherchent sans doute encore. En somme les idées ne sont point descendues jusqu’aux hommes ; elles n’y ont rien agité. Cela ne tient pas aux orateurs, mais au sujet qu’ils traitaient.

M. J.-J. Gourd a parlé d’abord. On lira ailleurs le texte même de sa communication. Trois idées ont surtout été remarquées par les auditeurs. La première, et, semble-t-il, la plus clairement expliquée, c’est que la philosophie est une psychologie qui se distingue à la fois de la psychologie dite rationnelle, et de la psychologie expérimentale. La psychologie rationnelle, en supposant sous le travail même de l’esprit une âme, c’est-à-dire une réalité inaccessible à l’expérience, perd par là tout caractère scientifique. Elle n’est rien de plus qu’une métaphysique de l’âme, une métaphysique dans le mauvais sens du mot ; elle explique le connu par l’inconnu. Le philosophe ne doit à aucun moment cesser d’adhérer, en quelque sorte, étroitement au réel ; s’il étudie l’esprit, qu’il étudie l’esprit concret, l’esprit appliqué au réel, la connaissance même du réel. C’est par là que la philosophie se distingue aussi de la psychologie expérimentale, laquelle tout au contraire, sépare l’esprit de l’objet. Restons dans la réalité accessible, mais dépassons les distinctions dont elle a été l’objet, en particulier celle qui place d’un côté le corps, le physique, et de l’autre le psychique, l’esprit ; remontons jusqu’à la réalité indivisée, intégrale. Aussitôt il nous parait que cette réalité n’est rien pour nous si elle ne se trouve à notre portée, si elle n’est « donnée » ou « donnable », si elle n’est ou ne peut être