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avons appelé le premier doigt, que ces sensations tactiles, dis-je, persistent et ne sont pas altérées par ces mouvements. Cela, c’est l’expérience qui nous l’apprend et elle seule qui pouvait nous l’apprendre.

Si nous avions distingué les séries de sensations musculaires + formées par la réunion de deux séries inverses ; c’est parce qu’elles conservaient l’ensemble de nos impressions, si maintenant nous distinguons les séries σ, c’est parce qu’elles conservent certaines de nos impressions. (Quand je dis qu’une série de sensations musculaires « conserve » une de nos impressions , je veux dire que nous constatons que si nous éprouvons l’impression , puis les sensations musculaires , nous éprouverons encore l’impression après ces sensations .)

J’ai dit plus haut qu’il arrive souvent que les séries σ n’altèrent pas les impressions tactiles éprouvées par notre premier doigt ; j’ai dit souvent, je n’ai pas dit toujours : c’est ce que nous exprimons dans notre langage habituel en disant que l’impression tactile ne sera pas altérée si le doigt n’a pas bougé, à la condition que l’objet qui était au contact de ce doigt n’ait pas bougé non plus. Avant de savoir la géométrie, nous ne pouvons pas donner cette explication ; tout ce que nous pouvons faire, c’est de constater que l’impression persiste souvent, mais pas toujours.

Mais il suffit qu’elle persiste souvent pour que les séries Σ nous apparaissent comme remarquables, pour que nous soyons amenés à ranger dans une même classe les séries Σ et Σ + σ, et de là à ne pas les regarder comme distinctes. Dans ces conditions nous avons vu qu’elles engendreront un continu physique à trois dimensions.

Voilà, donc un espace à trois dimensions engendré par mon premier doigt. Chacun de mes doigts en engendrera un semblable. Comment sommes-nous conduits à les considérer comme identiques à l’espace visuel, comme identiques à l’espace géométrique, c’est ce qui reste à examiner.

Mais avant d’aller plus loin, faisons une réflexion ; d’après ce qui précède, nous ne connaissons les points de l’espace ou plus généralement la situation finale de notre corps, que par les séries de sensations musculaires nous révélant les mouvements qui nous ont fait passer d’une certaine situation initiale à cette situation finale. Mais il est clair que cette situation finale dépendra d’une part de ces mouvements et d’autre part de la situation initiale d’où nous