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Sur la question de l’hypnotisme et de ses causes, M. Fouillée, fidèle à sa méthode de conciliation, n’accepte exclusivement aucune des deux opinions que se partagent les savants. Pour lui, l’explication psychologique de l’hypnose est dans la loi générale des idées-forces. Cette loi a son application évidente dans les cas fréquents où le sommeil hypnotique est dû à l’influence dominatrice de l’idée même du sommeil suggérée au patient. Quant aux cas où il est amené par des moyens physiques, il ne faut pas perdre de vue que, généralement, les excitations physiques sont de simples signes auxquels une éducation antérieure a associé l’idée du sommeil. Même quand il n’en est pas ainsi, il n’est pas douteux que l’hypnose n’ait encore une cause psychologique, qui est l’état de monoïdéisme provoqué par la stimulation physique. Toutefois, il ne faut pas ne voir dans les phénomènes hypnotiques que des phénomènes de suggestion : ils sont aussi des phénomènes nerveux qui réclament une explication physiologique. Celle-ci doit être cherchée, avec Lehmann, dans les actions vaso-motrices auxquelles il convient d’ajouter, avec Wundt, les actions neuro-dynamiques ainsi qu’une communication nerveuse de nature encore inconnue entre l’hypnotiseur et l’hypnotisé.

L’étude des effets de l’hypnotisme fournit une confirmation éclatante de la théorie des idées-forces. Le caractère de l’acte hypnotique est d’être une action à la fois réflexe et consciente : c’est l’action sous la domination d’une idée qui est presque seule et qui, de plus, a été suggérée du dehors ; c’est l’idée-force introduite par le magnétiseur dans une conscience qui s’y absorbe tout entière (II, 367). La représentation actuelle se réalise fatalement parce que rien n’entrave plus son développement ; le pouvoir de résistance et de direction est en quelque sorte paralysé à cause de l’affaiblissement ou de la disparition de l’idée de choix possible pour la volonté, de l’idée de liberté. Loin d’être un phénomène exclusivement mécanique ou un état inconscient, l’hypnose est « un état de la conscience où se réalise dans sa plénitude le règne des idées-forces ». C’est ce que démontrent les phénomènes de la catalepsie et les hallucinations hypnotiques sous toutes leurs formes ; ils rendent évidentes les deux lois fondamentales de la théorie : celle qui veut que toute idée isolée se réalise en un mouvement extérieur et celle qui veut qu’elle entraîne la croyance en la réalité de son objet. — L’action du mental sur le physique, surtout sensible dans l’état hypnotique où, la vie de relation étant réduite au minimum, la vie végétative reprend son empire et son retentissement primordial dans la conscience, et les effets curatifs de l’hypnotisme sont aussi d’éclatantes démonstrations expérimentales de la force inhérente aux idées et de l’unité du physique et du mental dans « la réalité concrète ».

Quant aux faits étranges de communication entre les cerveaux et par là entre les consciences, électivité, hypnotisation à distance, transmission des pensées et des sensations, télépathie (hallucinations véridiques individuelles, réciproques, collectives), ils ne présentent en soi rien de contraire aux données de la science. Il est possible qu’il y ait, ou plutôt il est impossible qu’il n’y ait pas des modes de communication à travers l’espace qui nous sont encore inconnus.