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les traces des premières. Sur quoi j’observe que le mot affection exprimant le résultat le plus immédiat de l’impression matérielle sensitive, celui d’intuition signifiait la forme que prenait cette impression dans le sens intérieur. Selon ce point de vue il y avait une analogie réelle entre les termes intuitions, commémorations, coordinations, combinaisons, etc., qui tous se trouvaient exprimer les formes des impressions simples ou composées, passées ou présentes. Dans l’avant-dernier projet que vous m’avez communiqué, ce point de vue se trouve changé ; vous y distinguez plus nettement, et en deux systèmes séparés, les phénomènes relatifs à la connaissance et ceux relatifs aux déterminations (c’est-à-dire à tout ce qui peut nous rendre heureux ou malheureux). L’intuition forme la base du premier système, comme l’affection est la base du second. J’adopte bien cette manière de voir qui semble d’abord se rapprocher tout à fait de la mienne ; ici l’intuition, étant la forme ou le caractère inhérent à certaines impressions particulières qui ont la propriété de se projeter au dehors, devient le titre commun de leur classe, de même que l’affection est le titre commun de toutes celles qui ont ce caractère particulier d’être agréables ou douloureuses, de nous rendre heureux ou malheureux. Je dis un caractère inhérent, et, afin de faire entendre ma pensée et la distinction que je prétends établir ici, je prendrai pour exemple celle que vous avez établie vous-même entre les modes de coordination et les rapports, les premiers ne dépendant nullement de la nature des termes coordonnés, et ne formant pas non plus une idée distincte et séparée de chacun d’eux ; telles sont les coordinations dans l’espace, par juxtaposition, superposition, etc., ou dans le temps par succession ; les seconds dépendant au contraire de la nature même des termes comparés et formant avec eux une idée individuelle, différente des deux termes, quoique perçue avec eux in concreto : tel est le rapport de causalité, etc.

Je conçois de même les opérations ou actes de notre esprit par rapport aux impressions ou modifications passives qui en sont les termes ou les matériaux. Il y a en effet de ces actes de l’esprit qui ne dépendent nullement de la nature des modifications ou impressions reçues auxquelles ils s’appliquent ; il en est d’autres qui en sont une dépendance nécessaire. Ceux-ci ne peuvent être conçus que dans le concret ou avec les modifications même dont ils font partie et dont ils ne sont aussi que logiquement abstraits ; ceux-là, au contraire, se conçoivent à part sous une idée individuelle, simple et réflexive qui