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de tirer du système, tel que ce philosophe l’a construit. Il conserve au principe des lois toute sa rigueur et toute sa généralité, il étend la portée et recule les bornes du principe de la conservation de l’énergie, et, après avoir ainsi enfermé le monde phénoménal dans un cadre rigide qui ne laisse aucune place à la contingence, à l’indétermination et à la nouveauté, il cherche à présenter le spectacle des choses en formation, en genèse et en devenir, au lieu de les montrer assujetties à la pérennité et fixées pour toujours en un cycle invariable.

L’évolutionnisme physique, dans les Premiers Principes, est une explication synthétique des multiplicités de succession. C’est ce qui le distingue des simples doctrines historiques où l’on se contente, avec une exposition analytique des multiplicités, de les relier par des rapports de causalité établis empiriquement. On ne se borne plus à indiquer l’enchaînement des phénomènes, on montre la raison de l’enchaînement en le déduisant d’un principe — premier ou dernier, selon le sens dans lequel on parcourt le système, — d’un principe qui exprime la relation la plus générale qu’on puisse énoncer entre les éléments les plus généraux, masse et mouvement, qui constituent l’être des phénomènes envisagés.

La marche suivie est d’abord analytique. Il faut montrer que toutes les transformations subies au cours du temps par les agrégats matériels les plus divers sont semblables quant à leur forme et à l’ordre de leur succession. En premier lieu, on commence par désigner du nom d’évolution la série des états par lesquels passe un agrégat matériel déterminé, dans des circonstances données, en rapportant à un même substrat l’agrégat, la multiplicité phénoménale qui est l’ensemble de ces états. On observe ainsi autant d’évolutions particulières qu’on considère d’agrégats particuliers. Chaque agrégat, pris individuellement, passe par une série déterminée d’états, a une histoire et manifeste un certain mode de transformations ; on dit qu’il évolue suivant une certaine loi, les lois particulières de l’évolution des agrégats exprimant ce fait d’expérience, à savoir que des agrégats semblables, placés dans les mêmes conditions, passent par les mêmes états et subissent, dans le même ordre, la même série de transformations.

Ensuite on remarque que des agrégats dissemblables, placés dans des conditions sensiblement différentes, tout en se révélant à l’observateur par des phénomènes différents, tout en étant le siège d’actions variées, ne laissent pas de présenter une certaine uniformité