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héroïque. « J’ai fui le mal et trouvé le bien », chantaient les initiés d’Eleusis. Fuir le mal, c’est se purger des souillures que fait contracter, avec le concours des passions basses, l’égoïsme ; trouver le bien, c’est pratiquer, en obéissant à l’inspiration qui fut toujours celle des grandes âmes, la vertu proprement surhumaine et divine, la générosité portée, s’il le faut, jusqu’à l’entière immolation de soi-même.


Remarquons encore, pour finir, que dans les deux degrés de la perfection morale se retrouvent les deux moments sur le rapport desquels fut fondée jadis et reposera apparemment toujours la métaphysique : la puissance, qui, dans la réalité des choses, est déjà tendance, disposition, mouvement, et l’action à laquelle elle marche. C’est la disposition que la pureté, que l’honneur, c’est l’action que la compassion, que la bonté. Et de même qu’en métaphysique, le meilleur étant toujours d’abord, c’est l’action qui est la source et la cause de la puissance, de même en morale c’est la source et la cause de la pureté, ou de la beauté, que la bonté. C’est pour être capable de sacrifices que le cœur doit d’abord être pur.


On pourrait dire semblablement, s’il s’agissait d’esthétique : la beauté suprême est la grâce, qui appartient au mouvement, et qui est, dans son abandon, l’expression et comme la figure sensible de l’amour. Et c’est pour que la grâce soit possible qu’il faut au préalable les proportions harmoniques en lesquelles consiste proprement la beauté.




En tout, d’abord le parfait, l’absolu, le Bon, qui ne doit son être qu’à lui-même ; ensuite ce qui est résulté de sa généreuse condescendance, et qui, par la vertu qu’il y a déposée, remonte de degré en degré jusqu’à lui.

Félix Ravaisson.