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tabilité de la connexion des notions, non seulement au sein de l’esprit autonome, mais aussi de l’expérience élaborée par la science ». En dernière analyse, ce principe exprime la nécessité vitale pour l’homme de « dégager, soit consciemment, soit inconsciemment, l’élément général en ce qui concerne le maintien de la vie, c’est-à-dire l’élément qui exige pour le maintien de la vie la même réaction qui a réussi dans le passé ».

Tel est le contenu de ce livre, où l’auteur, avec sa clarté et sa netteté coutumières, a tenté, d’un effort hardi qui force la sympathie, de restaurer l’édifice vermoulu de la scolastique. Nous ne pouvons nous arrêter sur les nombreux points de détail à propos desquels, notamment dans les parties où l’auteur veut réduire et simplifier, la discussion pourrait être provoquée ; l’espace nous manquerait à cet effet. Nous ne retiendrons pas non plus la conclusion bergsonienne, d’ailleurs surajoutée à l’ensemble du livre et qui pourrait en être facilement distraite. Nous ferons simplement, au sujet de ce livre comme au sujet des Éléments de logique formelle, quelques réserves qui portent sur la méthode. Nous croyons avec M. Luguet que la logique est une science, et doit aboutir, par conséquent, à l’établissement d’un formulaire. Mais comment ce formulaire doit-il être constitué ? L’auteur pense qu’il suffit, à ce propos, de reprendre la voie ouverte par la scolastique et de dégager la logique instinctive du langage. Ce postulat n’est pas le nôtre. La logique est la science des lois les plus abstraites de la pensée ; ce n’est donc pas sur l’analyse du langage qu’il convient de la fonder, car le langage mèle en un fouillis inextricable toutes sortes de relations dont toutes ne sont pas spécifiquement logiques. Il faut au contraire définir ces lois par rapport à celles pour lesquelles le travail d’abstraction est déjà commencé et qui constituent pour ce motif les premiers degrés d’élaboration de la science : si la mathématique est la langue universelle de la science, la logique doit être une généralisation de la mathématique. C’était déjà l’idée d’Aristote ; c’est aussi l’idée à laquelle conduit nécessairement la réflexion sur les progrès récents de la mathématique.

Les Antinomies entre l’Individu et la Société, par G. Palante, agrégé de philosophie, 1 vol. in-8 de 291 p., Paris, Alcan, 1913. — M. Palante continue à mener son « combat pour l’individu ». Mais il ne se contente pas ici de poser, comme l’avait fait Spencer, l’individu en face de l’Etat ; il analyse méthodiquement les diverses antinomies qui les opposent. Par société il entend d’ailleurs, non pas seulement l’État, mais « l’ensemble des cercles sociaux de toute sorte auxquels peut participer un individu » ; il n’érige pas la société en être de raison, mais il la conçoit simplement comme le système plus ou moins compliqué de relations sociales au sein desquelles un individu humain est appelé à vivre. Par individu il n’entend ni l’homme de la nature de Rousseau, ni l’individualité humaine conçue à la manière de Kant et de Fichte comme une unité absolue, ni un individu absolument isolé et indépendant, vivant en dehors de toute société, un individu nullement façonne ni influencé par la société : « la conscience individuelle est toujours pour une bonne part le reflet des mœurs et des opinions de son milieu… mais à côté de la partie qui,








dans l’individu, est façonnée par les influences sociales passées ou présentes, il y a un fond physiologique et psychologique qui lui est propre et qui apparaît comme —un résidu irréductible aux influences sociales ». Le problème étant

posé en ces termes, M. Palante étudie successivement les antinomies psycholologiques, esthétiques, pédagogiques, économiques, politiques, juridiques, sociologiques et morales.

Sur le terrain psychologique, l’auteur combat les doctrines sociologiques qui regardent l’intelligence comme un produit social et assignent à la connaissance une fin et une valeur exclusivement ou essentiellement sociales’(Durkheim, Draghicesco). La vérité peut être un simple

moyen de satisfaction logique ou csthéthique, sans aucun rapport nécessaire

avec les fins sociales ; la conscience n’est pas un simple épiphénomène de la vie sociale. M. Palante— réhabilite contre les partisans du sociologisme absolu la physiologie, l’hérédité et la r e (p. 14) il /c insiste, sur l’intuition, dont le triomphe’ sur la notion est le triomphe de ce qu’il y a d’individuel et d’intime en nous sur « ce qu’il y a de social et de conventionnel » ; sur l’ironie, ou « le moi individuel et le moi social se dédoublent et le premier se moque du second » (p. 35) ; sur l’idée de vérité qui a été « de tout temps la citadelle des.dogmatismes sociaux, la pierre angulaire des orthodoxies religieuses, scientifiques et morales » ; mais une loi : physiologique veut que deux cerveaux ne pensent jamais exactement de la même façon, d’où Un individualisme intellectuel irréductible, qui peut être l’individualisme purement négatif et destructeur de Stirner, que M. Palante