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Tout cela forme un ensemble d’allure un peu disparate ; et l’orientation de la nouvelle Revue semble loin d’être fixée. Si l’on songe au vaste champ d’études qui s’ouvre devant elle, il n’y a pas lieu de s’en étonner outre mesure. Souhaitons-lui plutôt de développer toujours davantage son originalité, et de fournir une longue et utile carrière.

Revue scientifique. – 11 mai 1907. Jules Sageret : La Genèse des Mathématiques. – Si les mathématiques ont une origine empirique indubitable, cependant l’empirisme ne suffisait pas à la constitution d’une science mathématique, et il aurait pu engendrer un art du calcul et un art géométrique, suffisant à tous les besoins d’une civilisation même très avancée, sans que pour cela fût fondée une science mathématique. En fait, il semble bien en avoir été ainsi et en Chaldée et en Égypte. Seuls les Grecs promurent les mathématiques à l’état de science théorique, et M. Sageret se rallie entièrement à la thèse de P. Tannery, indiquant les principaux résultats qui ressortent des études de ce savant. Ils durent, suivant lui, ce bonheur à la chance qui fit naître chez eux un Pythagore, métaphysicien mystique qui crut que connaitre les nombres, c’était connaître tout et pouvoir tout dominer, – au sens critique de leur race, – à leur instabilité politique et sociale. De cette histoire se dégage la double condition du développement des mathématiques 1° au début, l’empirisme ; 2° une idée mystique fécondant cet empirisme et assurant l’essor de la pensée. « C’est aussi la genèse des autres sciences. Mais celles-ci ne deviennent sciences que si elles passent par une seconde phase. L’idée initiale qui sera plus tard la théorie devra les amener il l’observation ou à l’expérience, tandis que les mathématiques tendent de plus en plus à se dépouiller de tout caractère concret. »

22 juin 1907. G. Milhaud : Pascal et les expériences sur le vide. – Pascal a-t-il composé un faux et commis une série de mensonges, pour s’attribuer le mérite d’avoir devancé ses contemporains dans l’expérience du Puy de Dôme ? M. Milhaud examine l’argumentation de M. Mathieu, et considère successivement la question des rapports de Pascal et de Descartes, – de Pascal et de Torricelli, – l’abrégé et la controverse avec le P. Noël, – la lettre à Perier du 13 novembre 1647. « Pour conclure, sauf quelques inexactitudes contenues dans la lettre à de Ribeyre, inexactitudes d’ailleurs incompréhensibles, inutiles à la gloire de Pascal, et à propos desquelles il faudrait dire, si c’étaient des mensonges, que Pascal a voulu mentir pour mentir, – je ne vois aucune difficulté à m’en tenir à ce qu’il a écrit lui-même, pour refaire l’histoire de sa pensée et de ses travaux. Même sans supposer qu’il ait plus de moralité ni de bon sens que la moyenne des hommes, j’admets qu’il a voulu dire la vérité dans des écrits tous destinés à quelque publicité, et je ne me heurte ainsi à aucune impossibilité. Cela me suffit : M. Mathieu ne m’a pas prouvé que l’hypothèse du faux et des mensonges est nécessaire. »

Hermes, XLII Band. Eine neue Archimedeshandschrift, par Heiberg, professeur à Copenhague. – M. Heiberg, le savant éditeur des œuvres d’Archimède, a eu assez de bonheur et assez de flair pour mettre la main sur un nouveau manuscrit du mathématicien de Syracuse. Ce manuscrit contient des parties quelquefois fort importantes des livres d’Archimède qui nous étaient déjà connus ce qui permet de contrôler les textes déjà publiés, et ce qui même permet de lire pour la première fois quelques passages du Traité des corps flottants que nous ne connaissions que par une traduction latine. En outre et surtout, il nous apporte un texte absolument nouveau auquel seulement nous pouvions trouver jusqu’ici quelque allusion chez Suidas et chez Héron. C’est un écrit adressé à Ératosthène. M. Heiberg en donne le texte, – qu’il a presque complètement reconstitué, malgré toutes les difficultés matérielles qu’il a rencontrées – et qu’il fait suivre de réflexions fort édifiantes.

L’intérêt de cet écrit est considérable. Il doit se placer dans les commencements de la carrière scientifique d’Archimède ; et, plus qu’aucun autre, il met en évidence ses procédés de recherche et d’invention. Or il y apparaît clairement que le procédé préféré du grand mathématicien, celui que non seulement il suit lui-même, mais qu’il recommande comme une méthode fructueuse, c’est la décomposition des surfaces et des volumes en éléments infinitésimaux, dont la somme représente les grandeurs considérées. Il restera ensuite à trouver une démonstration rigoureuse, mais celle-ci n’est pas indispensable pour qu’Archimède se sente en possession de théorèmes nouveaux ; Il se trouve ainsi rapproché, plus encore que nous ne le savions, des mathématiciens modernes. Sa méthode de recherche est celle du calcul intégral, au moins sous la forme des indivisibles

Ces conclusions ne surprendront guère d’ailleurs ceux pour qui la pensée mathématique des xvie siècle et xviie siècles n’est que