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– 25 – autres le travail de Buss dans le Philosophisches Jahrbuch. Surtout il ne faut pas oublier les auteurs français qui ont posé la question, avant le mémoire de Freudenthal que vous prenez à tort pour point de départ. Bouillier, dans son étude sur les Ennéades, rapproche Descartes et Plotin. Jourdain, en 1858, compare saint Thomas et Descartes, rappelle même que la preuve ontologique vient de saint Anselme, et conclut que la Théodicée de saint Thomas n’a pas été surpassée par Descartes. Hauréau, dans son Histoire de la Scolastique (2e édition, 1.872), ainsi que dans l’Histoire littéraire du Maine trouve l’origine du Cogito non seulement chez Eric d’Auxerre, mais remonte d’Eric d’Auxerre à Jean Scot Erigène, et de Jean Scot Erigène à saint Augustin et Plotin, etc. Qui a fait la révolution de la pensée moderne, écrit-il ? Descartes. Mais qui Ta préparée? C’est Guillaume d’Occam. » M. Gilson. -.le suis tout à fait d’accord qu’avant Freudenthal de nombreux auteurs avaient indiqué des rapports entre Descartes et la Scolastique. Mais je n’ai voulu citer que ceux qui se sont proposé exclusivement ce but. Aurais-je d’autre part négligé des rapprochements intéressants, comme entre Descartes et Eric d’Auxerre, ou Descartes et Jean Scot Erigène? Je ne le crois pas. Descartes ou ses professeurs de La Flèche ont-ils connu Jean Scot et Eric d’Auxerre? C’est infiniment peu probable. Je n’ai voulu rapprocher de Descartes que les textes qui ont pu lui être enseignés. M. Picavet. On a réédité Jean Scot Erigène au xvn° siècle. M. Gilson. Oui, mais deux ans avant la mort de Descartes. M. Picavet. On l’avait déjà condamné quatre fois. M. Gilson. Oui, mais pas après le xvie siècle. Quant à l’argument ontologique, pour reprendre directement la question, celui de Descartes ressemble plus à celui qui est exposé et critiqué par saint Thomas qu’à celui de saint Anselme tel qu’il se trouve dans le texte de saint Anselme. M. Picavet. Vous parlez de « l’École ». Or on ne peut parler de doctrine de l’ « École ne varietur. Consultez les travaux et l’histoire de l’Université de Pontà-Mousson en l’année 1623. II. Gilson. – Je parle simplement comme Descartes, quand il nous entretient de ses maitres de La Flèche. M. Picavet. C’est une doctrine importante, que celle de l’étendue chez Descartes. Or les néo-scolastiques aujourd’hui prétendent la retrouver dans la théorie thomiste de la quantité continue. Vous auriez dû rapprocher plus de textes sur cette question. De vos deux thèses on peut tirer la conclusion suivante Descartes a fait une évolution, non une révolution dans la philosophie. J’ajoute cependant que, chez saint Thomas, la religion naturelle n’est qu’une introduction à la religion révélée, tandis que chez Descartes la religion naturelle coexiste, indépendante, destinée à l’usage des laïques, sorte de théisme, comme dira le xvm" siècle, qui la reprendra seule là est l’originalité de Descartes. M. Lalande félicite M. Gilson du choix de son sujet de thèse complémentaire. C’est là un genre de travail très utile, qui, sans faire double emploi avec la thèse principale, lui est fort bien approprié. L’Index contient des textes nombreux et caractéristiques il est exact et précis. Néanmoins, je crains qu’il ne soit pas fort facile à manier. Pourquoi M. Gilson renvoie-t-il exclusivement, dans ses citations de Descartes, à l’édition Adam-Tannery, que l’on hésite à tirer tout seul d’un rayon de bibliothèque? D’autre part, M. Gilson a tort d’intercaler ses réflexions personnelles entre crochets, dans le texte, au lieu de les mettre en note. M. Gilson. C’est mon inexpérience qui ne pouvait trouver, pour les notes, de caractères plus petits. M. Lalande. Dans ce cas, on met un « filet » séparant les notes. Vous avez fait un emploi étrange de l’expression passim. Vous vous en servez dans le sens de en passant ». Ex. article Méthode au début. Vous n’avez pas toujours marqué l’importance différente des divers auteurs que vous citiez. Ainsi, vous vous servez de la « Somme du Feuillant au même titre que d’autres textes. Nous savons très bien (par une lettre de Descartes à Mersenne) que Descartes n’a connu cet ouvrage que de seconde main. M. Gilson. Je me suis occupé, non pas de savoir si les auteurs avaient été lus directement, mais si l’esprit des textes correspondait bien à celui des ouvrages utilisés à La Flèche. Ainsi, je me suis servi de Suarez, qui va jusqu’à soutenir l’innéité de l’idée de Dieu, en opposition formelle avec saint Thomas. Cependant, si la Somme du Feuillant et Suarez sont loin de représenter un th omisme orthodoxe, ils n’en ont pas moins eu de l’importance sur l’ensemble de l’éducation donnée à La Flèche, et, par suite’