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l’impossibilité de l’infini. Il étaye ses théories sur une discussion de la théorie des nombres transfinis de Cantor et de Véronese et il essaie de montrer que ces nombres ne s’appliquent pas au discontinu consécutif (Diskretum konsekutive). Dans la quatrième partie l’auteur fait quelques remarques sur le problème du continu. Il observe qu’il y a intérêt à séparer le problème du continu géométrique du problème du continu arithmétique, et tandis que le premier se résout facilement, le deuxième demeure sans solution.

De vagues dissertations à propos d’une géométrie qu’on aperçoit dans le lointain, et comme dans un brouillard, aucune preuve mathématique, aucune justification positive, telle est la méthode de M. Petronievics. L’ouvrage que nous venons d’analyser remplaçant les démonstrations par les développements purement verbaux doit être condamné en bloc parce qu’il pèche par la base. Ce n’est pas tel ou tel point particulier de la doctrine de M. Petronievics que l’on doit discuter — car il faudrait pour cela accepter sa manière de raisonner dans une certaine mesure ; c’est la conception scolastique d’où il est parti qu’il faut rejeter catégoriquement. Pour faire de la critique ou de l’histoire il faudrait un bon jugement et des connaissances scientifiques nombreuses et précises, mais ces qualités sont, avouons-le, complètement inutiles pour écrire un roman idéologique tel que M. Petronievics nous en donne un.

Die Willens-freiheit und ihre Gegner (2e édition augmentée), par le Dr Constantin Gutberlet, 1 vol. in-8o de 458 p., Fulda, Fuldaer Actiendruckerei, 1907. — Ceci est un livre de polémique. L’auteur le reconnaît dans la préface : « Nous avons donné une réfutation complète, décisive, universellement intelligible du monisme moderne, une apologie universellement compréhensible, invincible de la conception chrétienne. »

Après une position préalable du dogme du libre arbitre, c’est une suite de chapitres discutant une série de doctrines, assez dissemblables entre elles, mais toutes opposées au libre arbitre. L’exposé est clair et loyal. Mais, qu’il s’agisse de la statistique morale, de l’anthropologie, du déterminisme social ou psychophysiologique, de divers systèmes philosophiques contemporains (Schopenhauer, Rée, Paulsen, Höffding, Hartmann, Windelband, etc.), l’auteur n’a pas à cœur de saisir les principes profonds et le sens réel : ce qui pourtant est nécessaire pour un jugement motivé et définitif. La discussion, malgré l’ampleur de certains chapitres, reste superficielle. Si les lois d’ensemble établies par les statistiques ne contraignent pas les individus ; si les recherches de Lombroso et de son école n’établissent pas le déterminisme du crime même chez les tarés ; si les théories de Litzt et Mohr sur l’influence du milieu social, si la psychologie expérimentale de Wundt, de Münsterberg, de Ziehen ne réussissent pas à enserrer d’un déterminisme exact l’activité individuelle, l’auteur ne précise pas, n’indique pas toujours les vraies et décisives raisons de ces limitations.

Et de plus dans ce livre, réédité et fortement augmenté en 1907, l’auteur croit toujours au libre arbitre métaphysique, que tous possèdent, plus fort que toutes les circonstances ; il croit à la responsabilité absolue, le criminel ayant selon lui toujours gardé son libre pouvoir de décision, il oppose déterminisme et peine, déterminisme et moralité. Or, en France au moins, les idées sur la liberté, ne fût-ce que sous l’influence de M. Bergson, ont évolué, depuis le temps dont date cette conception du libre arbitre.

Si bien que ce livre est moins une « Apologie invincible » qu’un document sur une façon de penser qui date. Toujours est-il qu’il est fort bien informé ; par ses analyses et ses références il fait connaître une série d’auteurs et d’ouvrages et, s’il ne semble pas fournir de conclusions acceptables, peut fournir d’utiles renseignements — quoique sa documentation (en dehors de l’anthropologie et de la statistique morale) soit à peu près tout allemande.

The Will to believe as a basis for the defence of religious faith, a critical study by Ettie Stettheimer, 1 vol. in-8o, 97 p. New-York, the Science Press, 1907. — Étude serrée et sévère des doctrines religieuses de James dans leur rapport avec sa théorié du jugement. L’auteur s’efforce de montrer, en la confrontant avec les doctrines allemandes contemporaines les plus voisines, que la thèse de James est foncièrement équivoque et ne constitue pas un apport bien solide à la philosophie volontariste. — Après un bon exposé, il essaie d’établir d’abord que la défense de la foi religieuse comme la tente James compromet la valeur de toute connaissance : car James oscille entre une séparation radicale de la foi et de la connaissance, et une réduction de la connaissance elle-même à une affirmation purement volontaire qui ne