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ÉTUDES CRITIQUES

LES FORMES ÉLÉMENTAIRES DE LA VIE RELIGIEUSE[1]

Le travail récemment publié par le chef d’école des sociologues français ouvre une voie. d’entente et de. conciliation entre la sociologie et les autres branches de la philosophie. Des tentatives avaient déjà été faites dans ce sens par les adhérents de la même école, mais aucune n’avait eu la portée ni la lumineuse clarté de celle de M. Durkheim : s’appuyant sur les données fournies par l’étude d’une formé spéciale de la vie religieuse, l’auteur éclaire d’un jour nouveau le problème religieux proprement dit et montre comment tout en adoptant, dans sa considération de l’activité spirituelle de l’homme, le point de vue sociologique ; on peut reconnaitre le bien-fondé de points de vue différents. Souvent, et jusque dans les ouvrage antérieurs de M. Durkheim, la sociologie avait prétendu représenter à, elle seule la science morale. Dans l’ouvrage distingué qui fait l’objet de ces lignes, cette prétention est abandonnée, en termes formels, d’abord, mais aussi, et surtout, de façon implicite. Sans doute la vie collective, la société avec ses institutions et ses traditions, y est maintenue comme source de toute vie intellectuelle et morale ; mais à travers le développement ultérieur des idées maîtresses de l’œuvre, le lecteur critique est conduit, par la main de l’auteur, à un point de vue situé au delà de celui usuellement adopté par une sociologie exclusive. Et, hâtons-nous de le dire loin de perdre à cet élargissement des cadres, la sociologie y gagne. De même que, dans la société, c’est un signe de force et de vie que la liberté de mouvement et de développement des individualités, de même là science sociale aura une importance plus grande à mesure qu’augmentera l’indépendance des diverses

  1. Durkheim (E.), Les formes élémentaires de la vie religieuse, 1 vol. in-8 de 647 p., Paris, Alcan, 1912.